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L’ISOTOPIE ET LES ÉLÉMENTS ISOTOPIQUES

à ces deux espèces de plomb la même stabilité. Il est particulièrement frappant de constater que le rapport est très faible pour tous les minéraux contenant une forte proportion de thorium et peu d’uranium. Mais, d’autre part, l’examen du plomb de thorite, à poids atomique élevé, n’a révélé aucune radioactivité attribuable à la transformation du plomb de thorium (St. Meyer [46]) et plusieurs auteurs se prononcent en faveur de la stabilité de celui-ci.

La thorianite de Ceylan, minerai très ancien, en cristaux cubiques contient de 60 à 80 % de thorium et 10 à 30 % d’uranium. Le plomb qu’on en extrait a un poids atomique 206,82 à 207,2 (tableau VII). Ces nombres ne seraient compatibles avec l’hypothèse d’un mélange de plombs d’uranium et de thorium stables, qu’en réduisant considérablement l’âge prévu pour ce minerai et en admettant qu’il a subi une transformation. Les nombres du tableau indiquent, d’ailleurs, une augmentation du poids atomique du plomb des thorianites avec le rapport La monazite qui contient beaucoup plus de thorium que d’uranium se trouve probablement dans un cas analogue.

Les écarts entre le poids atomique du plomb des minerais radioactifs et celui du plomb d’uranium, paraissent devoir être expliqués, pour les minerais pauvres en thorium, par une introduction de plomb commun dès la formation du minerai. Toutefois, on explique difficilement ainsi certains écarts considérables tels que celui qu’on observe pour une carnotite du Colorado dont le plomb a presque le poids atomique du plomb commun. De nouvelles analyses sont nécessaires pour mieux préciser la relation entre l’uranium, le thorium et le plomb dans les minerais radioactifs.

Activité. — Tous les plombs provenant de minéraux radioactifs possèdent eux-mêmes une certaine radioactivité. Il n’existe pas, cependant, de relation simple entre l’activité mesurée par divers expérimentateurs et le poids atomique indiqué. La radioactivité s’explique par la présence du radium D, du radium E et du polonium qui sont des dérivés de l’uranium. Le radium D étant un isotope du plomb, est entraîné avec celui-ci dans la séparation, et comme sa vie moyenne est longue (période d’environ 16 ans) il demeure avec le plomb et donne lieu à une production de radium E et de polonium. Sa présence ne peut influencer le poids atomique, mais l’activité mesurée dans des conditions convenablement choisies, devrait être proportionnelle à la teneur en uranium.