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LA RADIOCHIMIE

chez des substances susceptibles de cristalliser ensemble, en toute proportion, cette faculté pouvant aller jusqu’à l’isomorphisme complet.

L’adsorption est un effet de surface plus ou moins sélectif, déterminé par les forces de cohésion moléculaires et ayant une relation encore très imparfaitement connue avec les propriétés chimiques. On peut l’empêcher en adjoignant, à la substance présente à l’état de trace, une quantité suffisante de substance ayant avec elle une parenté chimique étroite, sur laquelle portera désormais l’entraînement. C’est ainsi que l’adsorption de l’uranium X1 par le charbon est empêchée par l’addition de thorium, dont l’uranium X1 partage les propriétés chimiques. Mais l’addition de thorium peut jouer le même rôle en ce qui concerne le cuivre qui subit aussi l’adsorption du charbon [13]. Celle-ci s’exerce même sur l’émanation du radium qui est un gaz inerte privé d’affinités chimiques.

C’est donc seulement par un ensemble d’expériences et essais variés qu’on peut se rendre compte des caractères chimiques des substances radioactives, par le seul usage des réactions chimiques. La tâche est d’autant plus aisée que les propriétés de l’élément considéré sont plus franches ; elles n’ont pas prêté à équivoque dans le cas du radium. Dans d’autres cas les difficultés ont été plus grandes, par exemple pour le polonium et pour l’actinium.

Pour mettre en évidence la nature chimique d’un radioélément, on emploie principalement les méthodes suivantes :

1° Le radioélément étant dissous en présence d’un élément chimique connu, on sépare celui-ci à l’état de précipité insoluble ; la précipitation simultanée de l’élément radioactif est une présomption d’entraînement par parenté chimique.

2° On effectue une cristallisation de la solution. La possibilité de former des cristaux mixtes est une indication de parenté chimique.

Ces méthodes ont été appliquées séparément à l’étude des radioéléments nouveaux, dans l’ordre de leur découverte. Elles ont aussi été systématisées par quelques savants, en vue d’énoncés généraux. Les résultats des opérations de précipitation ont été résumés des deux manières suivantes : (Fajans et Beer [14], Paneth et Horovitz [15]).

Un radioélément est précipité avec un élément ordinaire, si la précipitation a lieu dans les conditions où le radioélément serait précipité s’il était présent en quantité pondérable.

Un radioélément est précipité avec un sel, par entraînement ou adsorption, s’il forme avec l’anion une combinaison peu soluble dans le solvant considéré.