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LE ROCHER PANET

l’œil enflammé, à la respiration entrecoupée ; une main se crispait dans sa chevelure humide, l’autre, d’un geste menaçant montrait les flots en courroux ; la lutte allait s’engager entre l’ange de Dieu et Satan invisible.

« La peur circule à travers les rangs, au rivage. Par un de ces pressentiments qui lui sont habituels, le saint vieillard en est averti, et, se retournant vers ses fils, il trace un long signe de croix qui fait rugir la possédée mais rend aux enfants la confiance : ils se remettent à prier.

« Le prêtre aussitôt récite avec force les foudroyantes formules de l’exorcisme auxquelles le diable terrorisé se voit contraint d’obéir en maudissant. Cette fois, il se décide pourtant à la résistance, et une scène terrible se déroule sur le rocher qui tremble d’abord, puis bondit comme un vaisseau qui va sombrer ; d’affreux hurlements échappent de tous les antres, et l’infortunée, se frappant la tête contre les pierres, vomit des propos d’enfer ; quand tout à coup elle disparaît au sein des flots amoncelés. Aussitôt un énorme nuage voile le ciel de noir, le tonnerre roule les échos de sa grande voix, et les éclairs agitent dans les nues des épées de feu.

« Ô Dieu ! venez à notre aide ; Seigneur ! hâtez-vous de nous secourir, » criait la foule du rivage : « Ô Christ, qui avez délivré Madeleine des sept démons qui tenaient son âme cap-