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LA GROSSE-ISLE

lentement leurs cabanes de fortune, à vingt pas de la mer hurlante….

Sur la route où nous marchons, le vent du large qui a lavé la face des étoiles, nous soufflette et nous fait baisser la tête. Que sera demain ?… Je voudrais tant que demain fût beau et tranquille, sans doute pour nous ouvrir la route de Brion, mais surtout — oh ! très sincèrement, — pour apporter la joie sainte du travail aux pêcheurs du Barachois, et pour voir renaître le sourire de la petite Justine !…

Le grand soleil d’hier, ironique et joyeux. Pour nos yeux terriens, la mer est toujours aussi agitée. Mais évidemment nous n’y connaissons rien. Elle a dû beaucoup calmir car, sauf le père Décoste, tous les pêcheurs sont au large, sondant au maquereau. Ils ont poussé durant la nuit, aux étoiles, et du haut du Cap-Nord, on peut les voir, points infimes dispersés sur l’étendue, margaux lointains posés sur la face crépue de la mer.

Édouard à Léon viendra sûrement, ont dit les femmes ! Et cependant neuf heures, dix heures, onze heures ne l’amènent pas. À bout de patience nous songeons à noliser un bateau de pêche. Le père Décoste, à qui nous faisons des ouvertures, va voir la mer un long moment, rentre et nous