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LA GRANDE-ENTRÉE

milieu des homarderies et des constructions de bois jetées pêle-mêle sur la plage dans le plus pittoresque désordre. À la recherche de la pension du lieu, nous allons d’arrache-pied, dans le sable jusqu’aux chevilles, entre les logis surpeuplés pour la saison de pêche. Après ces cinq heures de suroît et de washing, il fait bon se chauffer à l’abri et croquer les tourteaux blancs de l’hôtesse. Bientôt réconfortés, nous nous acheminons pédestrement vers le presbytère inhabité dont nous avons la clef, et qui sera notre quartier-général pour une semaine.

La Grande-Entrée est le meilleur havre des Îles de la Madeleine pour les navires de moyen tonnage. Et cependant, un fort vent du sud-ouest peut empêcher le paquebot d’entrer ou de sortir, et exercer la patience de ceux qui ne sont pas Madelinots par naissance ou par tempérament. L’île est occupée partie par des Acadiens — ils y ont une église mais pas de prêtre résident — partie par des Anglais cantonnés à la pointe de Old Harry. Ces Anglais, spécialisés dans la pêche du homard, travaillent jour et nuit durant le mois qu’elle dure, mais ne font plus rien le reste de l’année. Ils ont un temple et un ministre, et l’Île entière fut réservée par le premier seigneur, l’Amiral Coffin, pour le soutien de l’Église anglicane.