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DE MARGUERITE DE NAVARRE

Abbés, Sénateurs, que Marguerite avoit retenus de sa Maison en estat de ses Maistres des Requestes & Conseillers, & aultres, Lieutenants, Juges & Magistrats, lesquels seroit trop long nommer par ordre, mais tous de sçavoir & bon jugement.

Quant aux vostres, ô Alençonnois, je dy des Sieurs Moynet, Groslot, Moynet le fils, Le Coustelier, Maistres des Requestes, Bonin, Dagues, Thorel, Pelletier, Rouillé, Hervé, Farcy, Truchon, Conseillers de l’Eschiquier & Conseil, que Marguerite vous avoit baillés pour administrateurs de justice, vous sçavés trésbien ce qu’on en peut dire, car vous avés fait longue expérience de leur diligence, sçavoir, prudence & intégrité, &, de ma part, j’en dirois quelque mot si ne craignois mon tesmoignage tomber en suspition de flatterie, pour ce qu’ils m’ont eu compaignon & confrère en leur Estat.

Or n’estoit contente la bonne Royne d’avoir appelle à sa Maison & retenu à ses gaiges tant de notables personnages, mais aussi leur faisoit tousjours le plus d’honneur qu’elle pouvoit, ne tenoit en leur absence aulcun propos d’euls, ou ne parleoit à euls, ou ne leur escrivoit sans leur donner tiltre d’honneur. Car elle avoit ouy de Platon l’honneur d’une Cité estre lors gardé quand l’on rend au Magistrat & à toutes aultres honorables personnes l’honneur qui leur appartient.

Ô qu’à grand regret ceuls en feroient aultant qui couchent assés facilement en leur Estat les hommes doctes & de bon esprit, mais, encor que du tout ils dépendent de leur prudence & conseil, toutefois, pour autant qu’ils sont possible venus de gents de basse condition, ils n’hont aulcun égard aux vertus qui les ennoblissent, ains leur sembleroit qu’ils deshonnoreroient la dignité du tiltre de Noblesse