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CONVERSION

favorable à ma conversion ; il insiste toutefois beaucoup sur l’illégalité de cet acte, qui aurait dû être accompli au vrai lieu de mon domicile.

C’est un gentleman, courtois, galant. Finalement, il signe : « Avis favorable ».

La première manche est gagnée. Il reste encore à obtenir l’acte définitif qui doit émaner de Jérusalem dans trois ou quatre jours.

Le fidèle Azem m’accompagne partout. Soleiman, lui, se défile toujours pour dormir, boire du café, fumer, afin d’oublier sa nostalgie du désert. Cette atmosphère de ville l’étouffe. Il répète sans cesse : Ah ! Zeînab, où sont les tentes, le grand silence du jour et surtout de la nuit, le rythme du pilon dans le mortier ? »

Je passe les journées à me promener seule le long de la mer, ou bien j’achète quelques provisions : pain, olives, fromage blanc, croquettes de viande, que je mange dans ma chambre. Une femme musulmane ne doit pas aller au restaurant. Un jour, dans une rue, j’aperçois un diseur de bonne aventure, accroupi sur le trottoir devant un petit mouchoir couvert de sable. Plus que jamais, je désire savoir ce que me réserve l’avenir. Je m’accroupis à terre et, au milieu du groupe, grisée de la liberté et de l’incognito que me procure mon voile, je marque avec le doigt des points sur le sable, correspondant au nombre de lettres du mot « Zeînab ». À voix, basse, l’oracle me confie :

— Tu réussiras un grand voyage, mais tu auras de grands ennuis et de grandes disputes avec le Gouvernement.

Sans y croire un instant, Je suis toutefois satisfaite, l’essentiel est la réussite, Je triompherai toujours des difficultés.

Je retrouve d’habitude Soleiman le soir, dans