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LE MARI PASSEPORT

enfilées en grosses torsades, et retenues par un seul cordonnet qui sert de fermeture dans le dos. Dans une boîte à pilules purgatives, des séries de boucles d’oreilles en or massif sont très ouvragées.

La situation sociale d’une femme étant fonction de l’importance et de la valeur de ses bijoux, comme je n’en ai aucun, ce qui est incompréhensible pour une jeune mariée, ces pauvres femmes ont beaucoup de mal à se faire une opinion de mon rang.

Le sujet de l’amour physique est inépuisable ici dans la conversation ; on s’interroge sur les parties intimes des maris, sur leur manière de procéder, et principalement sur la jouissance que nous, femmes, en éprouvons. La plupart m’avouent qu’elles sont plutôt dégoûtées par ce petit jeu, mais qu’elles sont obligées de s’y soumettre sans aucune récrimination possible puisque c’est leur seule raison d’être.

J’imagine que leur sensibilité est atrophiée parce qu’elles se marient trop jeunes et que le premier acte ne leur fait éprouver que de la douleur, les hommes étant violents et passionnés. Elles en parlent pourtant sans arrêt, et ne dédaignent pas les plaisirs qu’elles peuvent se procurer entre elles ; ces pratiques, affirment-elles, sont très répandues au Hedjaz. Elles m’interrogent sur mes habitudes intimes. Leurs rapports sexuels doivent être plutôt violents, à en juger par les ecchymoses dont est couverte Fakria quand elle revient d’une partie de plaisir avec Ali Allmari. Elle en est assez fière et les montre avec satisfaction.

Sett Kébir ne cesse de parler de Taïf, le seul endroit du Hedjaz où il y ait de la verdure et de l’eau courante. Elle croit m’éblouir et me faire entrevoir des paysages inconnus et inimaginables. Je lui raconte que chez mes parents, à la campagne, nous