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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

rique, où le fermier expérimenté, avec ses instruments européens, fait sans cesse sur les déserts de nouvelles conquêtes, on ne connaît presque pas le besoin, et tout est dans un état de prospérité. On peut se faire une idée du rapide accroissement du capital de ce pays par sa population. La facilité avec laquelle les habitants des États-Unis acquièrent ce qui suffit à l’entretien d’une famille encourage à se marier de bonne heure, et produit des familles nombreuses ; les enfants sont bien nourris, bien portants, florissants. Vous comprendrez quel peut être le rapport des morts aux naissances, quand vous saurez, qu’aux États-Unis, la population double à peu près en 23 ans.

CAROLINE.

Un tel accroissement de population ne réduit-il pas le taux des salaires ?

MADAME B.

Non, parce que le capital croit dans une proportion encore plus forte ; et tant que cela dure, vous savez que les salaires doivent hausser plutôt que baisser. Mais tout ce que je viens de dire ne s’applique, en Amérique, qu’aux États-Unis, qui jouissent d’un gouvernement protecteur de la propriété des hommes de toutes les classes. Dans les établissements espagnols, où le gouvernement est fort différent, les peuples sont dans un état beaucoup moins florissant. La population du Mexique, l’une des plus belles provinces de l’Amérique espagnole, ne double pas en moins de 48 ans.

CAROLINE.

Je n’entends pas bien toutefois pourquoi les pauvres seraient dans un état pire en Angleterre, où il y a un grand capital, qu’aux États-Unis, où le capital est petit.

MADAME B.

Cela vient de ce que vous oubliez de nouveau cette règle fondamentale que le capital doit toujours être envisagé dans son rapport au nombre des individus qu’il doit employer et entretenir.

En Angleterre et dans tous les anciens pays de l’Europe, la population a crû graduellement, jusqu’au point d’atteindre le niveau des moyens de subsistance ; et comme l’Europe n’offre plus la