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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

MADAME B.

Non, mais elle commence à s’établir aussitôt que les échanges s’introduisent ; et c’est à ce circuit d’opérations que nous sommes redevables de tous nos progrès en dextérité et en industrie ; les avantages qui en résultent sont plus importants que vous n’imaginez.

Dès que les trocs devinrent communs, on ne tarda pas à découvrir que plus un homme se bornait à une seule branche d’industrie, à la fabrication des arcs et des flèches, par exemple, plus il acquérait de talent et de dextérité dans cet art particulier ; tellement qu’il en venait à faire des arcs et des flèches non-seulement en moins de temps, mais d’un travail plus parfait qu’un autre homme qui entreprenait plusieurs ouvrages à la fois.

CAROLINE.

Maintenant je commence à comprendre l’avantage qui résulte des échanges, indépendamment de cet esprit d’industrie et de ce goût pour des jouissances de diverse espèce qui en sont la suite. L’ouvrier qui a acquis une supériorité décidée dans la fabrication des arcs et des flèches, gagnera plus à se borner à cette occupation, et à changer cette espèce de marchandise contre les choses d’une autre nature qu’il peut désirer, que s’il dirigeait son attention sur une multitude de travaux divers.

MADAME B.

Sans contredit, pourvu toutefois qu’il soit sur de pouvoir disposer de tous les arcs et flèches qu’il fera ; car il lui serait inutile d’en faire plus qu’il n’en pourrait vendre ou échanger ; et comme personne ne se présenterait pour les acheter, à moins qu’il n’eût quelque chose à donner en retour, il s’écoulerait un long espace de temps avant que les progrès de l’industrie pussent créer un nombre d’acheteurs suffisant pour mettre un homme en état de gagner sa vie par la fabrication des arcs et des flèches.

Ce n’est donc que dans un état de société plus avancé, que la demande des marchandises est assez grande pour que les hommes trouvent leur avantage à se vouer exclusivement chacun à un art particulier.

Adam Smith s’exprime ainsi à ce sujet : « Dans ces maisons iso-