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SUR L’ÉCONOMIE POLITIQUE


LE COMMERCE DU BLÉ,
OU
LE PRIX DU PAIN.


John Hopkins se promenait un jour avec le fermier Stubbs, qui l’avait prié d’aller avec lui examiner ses récoltes. Comme ils passaient auprès d’un champ de blé, où il y avait autant de fleurs de pavots que d’épis :

« Il me semble, dit Hopkins, que ce champ ne vous paiera pas tout le travail que vous y avez dépensé ; on peut dire que vous avez mis beaucoup d’argent à lui faire rendre le peu qu’il rend. Il paraît que ce terrain est bien mauvais.

— Je ne suis pas si sot que vous le supposez, répondit Stubbs ; quoique je n’aie point passé ma jeunesse sur des livres, je tiens compte de mes déboursés et de mes rentrées, et avant d’ensemencer ce champ, j’ai calculé à peu près ce qu’il pouvait me rapporter ; si je n’avais pas vu la chance d’être payé de mes dépenses et de faire de plus un joli gain, je n’y aurais pas semé mon blé. Il est vrai que le blé ne se vend pas aussi bien qu’autrefois, mais le prix en est encore assez élevé pour que ce misérable petit morceau de champ me rapporte quelque profit.

— Ah ! reprit John, vous avez de beaux champs au sud de la colline, près de la rivière. C’est là un bon terrain, des récoltes qui font plaisir à voir ! Elles vous dédommageront bien de la pauvreté de cette pièce-ci, de manière que l’un dans l’autre vous ferez de beaux profits ; mais si vous ne possédiez que ce champ, je doute fort que vous pussiez y gagner.

— C’est là où vous vous trompez, reprit Stubbs, car si ce champ ne rapportait pas sa valeur en blé, je l’aurais mis en herbe, ou, s’il n’était pas assez bon pour cela, je l’aurais planté d’arbres.