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CONTES POPULAIRES

donner quelques explications nécessaires pour comprendre le sens de mon récit. Mais la petite Betty dira que voici l’ennuyeuse morale qu’elle trouve toujours à la fin de ses fables ; ainsi, envoyez coucher vos enfants.

Les deux plus jeunes allèrent au lit, mais les aînés demandèrent à rester.

« En effet, poursuivit le colporteur, n’y a-t-il pas dans la nature des pouvoirs gigantesques, qui assistent l’homme dans ses travaux ? »

(Les enfants écoutaient attentivement, espérant encore qu’ils verraient un géant.)

« Dites-moi, ajouta le marchand en s’adressant à Hopkins, qui est-ce qui fait tourner le moulin à scier les planches dans la forêt voisine ?

— Personne ; c’est la rivière qui fait tourner la roue.

— Et cette rivière, John, elle ne vous demande ni salaire, ni logement, ni nourriture.

— C’est vrai, reprit Hopkins en se grattant la tête, je n’y avais jamais réfléchi.

— Eh bien ! c’est Aquafluens, dit le marchand.

— Je comprends, dit Jenny, qu’il a pu nettoyer la maison, laver les enfants et leur enseigner à nager ; mais comment pouvait-il transporter du bois ?

— Comment ? s’écria Tom ; dans un bateau. Ne vous souvenez-vous pas qu’on avait placé sur son dos une boîte pour contenir le bois ? c’était un bateau.

— Ah ! c’est cela ; et le bâton pour faire marcher le géant, c’était une rame.

— J’avoue, dit Hopkins, qu’il y a dans votre conte plus de vérité que je ne pensais.

— Et Ventosus ?… reprit le marchand.

— Oh ! interrompit Tom, laissez-moi deviner. Je pense que Ventosus n’est autre chose que le vent, qui, lorsqu’il se dispute avec Aquafluens, fait écumer et enfler ses vagues, et qui tourne la roue du moulin pour moudre le blé.

— C’est vrai, dit Hopkins, le vent est encore une de ces puissances gigantesques de la nature, auxquelles nous avons beaucoup d’obligations. Eh bien ! mon ami, votre conte m’a appris à apprécier les grands bienfaits de la Providence, et aussi, je l’espère,