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CONTES POPULAIRES

dant trois jours, cela reviendra au même, puisque vous gagnerez pour six jours pendant les trois autres. »

John trouva que c’était peu consolant, au moment où il se voyait deux enfants de plus à entretenir. L’intendant prit congé de la triste famille. Lorsqu’il fut sorti, madame Hopkins soupira, et, joignant ses mains :

« Ah ! s’écria-t-elle, que nous sommes stupides et que nous entendons mal nos intérêts ! Nous avons cru que cette nouvelle loi allait nous enrichir, et il se trouve qu’elle met le comble à notre misère.

— Ne crains rien, dit John, tout cela ne peut durer plus de trois mois, et en voilà déjà deux d’écoulés.

En effet, à la fin du troisième mois, les choses avaient repris leur cours habituel. Dick et Sally étaient retournés l’un à sa filature de soie, l’autre à sa manufacture de drap, et le pauvre John avait recommencé à labourer de bon cœur les six jours de la semaine.

Il avait durement appris combien il est dangereux de se mêler des choses que l’on ne comprend pas, et il se promit bien de ne plus appeler la fée à son secours, mais de s’efforcer d’acquérir sur ces matières des notions plus précises.

Le séjour de Dick auprès de lui ne lui avait pas été inutile, parce que celui-ci vivant habituellement dans une grande manufacture de la ville, avait eu plus d’occasions de s’instruire que n’en a un laboureur dont la vie est tout à fait solitaire. La hausse et la baisse du prix des marchandises est d’un si grand intérêt pour les ouvriers des fabriques, qu’ils en parlent souvent entre eux, et finissent par acquérir sur ce sujet des connaissances assez justes.

Ils s’aperçoivent bientôt que la prospérité du fabricant et celle de ses ouvriers marchent ensemble.

Comme John s’étonnait du savoir de son fils, qui avait été très-peu de temps à l’école, Dick lui fit observer que l’on peut apprendre tout autant dans une fabrique que dans une école, mais que seulement c’est en causant qu’on s’y instruit, et non en lisant.

« Mais je pensais, Dick, que vous parliez de choses plus amusantes, et que vous ne vous creusiez pas la tête sur ces sujets-là.

— Les hommes les plus simples deviennent intelligents toutes les fois qu’il s’agit de leurs intérêts, et c’est fort heureux,