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SUR L’ÉCONOMIE POLITIQUE

loin d’être en état de secourir ses parents, il leur apportait la triste nouvelle qu’il venait d’être renvoyé de la fabrique où il était occupé.

« Comment donc ! lui demanda son père ; n’étais-tu pas content de ton nouveau salaire ?

— Oh ! répondit le jeune homme, c’était bien les premières semaines ; mais j’aurais beaucoup préféré qu’il n’y eût pas de changement et conserver ma place.

— Mais si tu faisais bien ton devoir, pourquoi as-tu été renvoyé ?

— Quant à cela, mon maître était très-satisfait de moi ; mais la hausse des salaires l’a obligé de renvoyer la moitié de ses ouvriers, et j’ai été de ce nombre.

— S’il renvoie la moitié de ses ouvriers, il fera la moitié moins d’ouvrage ; comment donc pourra-t-il continuer à fournir les marchands en détail ?

— Il dit que les demandes sont beaucoup moins considérables depuis que cette nouvelle loi a passé.

— Voilà qui est faux ! s’écria John ; car il n’y a pas un mois que le marchand drapier m’a assuré qu’il vendait beaucoup plus de drap depuis le changement des salaires, quoiqu’il le vendît plus cher qu’auparavant.

— C’était comme cela au premier moment, parce que chacun se trouvant posséder plus d’argent qu’il n’en avait jamais eu jusque là, se croyait riche et en état de faire beaucoup plus de dépense ; mais quand on a vu hausser le prix des marchandises, et que plusieurs ouvriers ont été privés de leur gagne-pain, on a bien vite restreint ses dépenses aux choses de première nécessité. «

Hopkins se mordit les lèvres, prit un air capot, et ne trouva pas un mot à répliquer.

« Non, reprit Dick, autant le commerce allait bien précédemment, autant il va mal maintenant.

— Je le vois à mes dépens, dit madame Hopkins ; au dernier marché, j’ai eu bien du mal à vendre mes fruits et les tresses de Jenny la moitié de ce qu’ils se vendaient il y a quelques semaines. »

La baisse dans le prix des marchandises parut favorable à John, qui dans ce moment n’avait rien à vendre et se proposait d’acheter beaucoup de choses. Cette réflexion lui rendit le courage.

« Je crois, Dick, que si les choses continuent à se vendre à un prix modéré, et que les salaires restent tels qu’ils sont, nous nous