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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

croient souvent convenable d’encourager l’exportation des produits de leurs manufactures par de telles mesures artificielles.

CAROLINE.

Ainsi une gratification sur une certaine marchandise a l’effet d’engager les marchands à en exporter plus qu’ils ne le feraient sans cela, parce qu’elle augmente leurs profits. Mais en conséquence le capital doit être attiré dans cette branche de commerce au delà de la juste proportion ?

MADAME B.

Certainement. Souvent une gratification engage les marchands à placer leur capital dans un commerce qui sans cela ne donnerait pas de bénéfice, c’est-à-dire, à exporter des marchandises qui, sans cet encouragement et déduction faite des frais de transport, ne laisseraient pas de profit ; et ce même capital, s’il n’avait pas été détourné artificiellement de son cours naturel, aurait coulé dans des canaux, où il aurait donné des profits, sans causer au gouvernement aucune dépense.

CAROLINE

Ici donc, la crainte que j’avais du commerce extérieur était bien fondée, car on y applique plus de capital qu’il n’est requis pour maintenir l’égalité des produits.

MADAME B.

Cela arrive quelquefois ; mais il peut aussi se faire que le capital soit détourné mal à propos d’une branche du commerce extérieur dans quelque autre espèce de commerce. Du reste l’effet des gratifications est généralement contre-balancé par les nations avec lesquelles nous commerçons. Elles prennent l’alarme en voyant que nous forçons nos marchandises à passer chez elles ; et de peur que ces marchandises ne fassent une concurrence funeste à leurs propres manufactures, elles se hâtent de charger d’un droit la marchandise à laquelle nous accordons une gratification et l’obligent de payer, à l’entrée de leur territoire, une somme au moins équivalente à celle que nous lui accordons quand elle quitte le nôtre.