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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

se faire quelque idée de la différence de valeur de l’argent dans les temps anciens et modernes par le compte du revenu que Xerxès, roi de Perse, retirait de son vaste et opulent empire, et qui suffisait à maintenir ses flottes et ses armées innombrables. L’histoire atteste que ce revenu n’était que de trois millions sterlings.

CAROLINE.

La prodigalité et les profusions des Romains étaient au fait encore plus grandes qu’elles ne paraissent au premier aspect, puisque les sommes immenses qu’ils dépensaient en objets de luxe avaient plus de valeur qu’aujourd’hui.

MADAME B.

Comme la richesse des Romains provenait en grande partie des dépouilles des pays conquis, l’or et l’argent faisaient une partie essentielle de leurs pillages ; il a donc pu arriver que les espèces monnayées aient eu chez eux moins de valeur, à la même époque, qu’en d’autres contrées.

L’augmentation de quantité des métaux précieux n’est pas la seule cause qui opère une dépréciation dans la valeur de la monnaie. Cette valeur varie par des causes tout à fait différentes. L’une de ces causes est l’altération de la monnaie. Une livre sterling, faisant vingt shellings, pesait, dans l’origine, une once d’argent ; c’est ce qu’indique le nom même qu’on lui donne. Mais les rois, en frappant des monnaies nouvelles, ont souvent trouvé bon de les altérer en mêlant au métal pur de l’alliage. C’était un moyen d’augmenter leurs trésors, en payant leurs dettes avec une moindre quantité de métaux précieux, et de tromper ceux de leurs sujets qui étaient leurs créanciers et qui, dans le commencement, ne s’apercevaient pas de la fraude.

En 1351, Édouard IV, ne sachant comment acquitter les dettes qu’il avait contractées dans ses chimériques entreprises sur la France, employa ce moyen de payer ses créanciers avec moins d’argent qu’il n’en avait reçu d’eux. Il ordonna qu’une livre d’argent fût taillée en 266 deniers, au lieu de 240. Satisfait du bénéfice de cette opération, il fit bientôt porter à 270 le nombre des deniers fournis par cette même livre. À l’aide de cette imposture, non-seulement les créanciers de la couronne, mais tous les autres créanciers, furent fraudés d’environ une dixième partie de leur