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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

l’intérieur et surchargent le marché. L’offre, en ce cas, surpassant la demande, il arrivera que ces marchandises tomberont au-dessous de leur prix naturel, afin d’attirer un plus grand nombre d’acheteurs ; la consommation augmentera ; mais les fabricants et marchands, forcés de vendre au-dessous des frais de production, perdront, au lieu de gagner, à l’exercice de leur industrie.

CAROLINE.

Je me souviens que les calicots et les mousselines anglaises étaient à meilleur marché pendant la dernière guerre qu’à présent ; et les marchands disaient, qu’au prix où on les vendait, la main-d’œuvre n’était pas payée, indépendamment de la valeur de la matière.

MADAME B.

Le bas prix de ces marchandises, quoiqu’il fût l’effet de l’abondance, loin d’être un signe de prospérité, annonçait la ruine des fabricants et de leurs ouvriers.

CAROLINE.

Mais vous disiez, que si le prix d’une marchandise ne remboursait pas la rente, les profits et les salaires, elle ne serait pas produite ?

MADAME B.

Dans le cas dont il s’agit, la chute du prix n’eut lieu qu’après la production ; quand la dépense de travail a déjà été faite, il vaut mieux vendre à tout prix la marchandise qu’il a produite, que de perdre la valeur entière. Mais dans la suite, les fabricants ont dû en fabriquer moins ; en conséquence leurs ouvriers auront été privés d’ouvrage, et une partie du capital employé à cette production en aura été détournée.

L’abondance et le bon marché ne sont réellement avantageux que quand ils proviennent d’une diminution dans les frais de production. Ainsi lorsqu’on emploie quelques machines nouvelles, ou qu’on introduit quelque perfectionnement dans les procédés de l’art, qui met les fermiers ou les fabricants en état de produire leurs marchandises à moindres frais, la réduction qui en résulte dans le prix est un bénéfice pour le producteur et pour le consommateur ; pour le premier, parce que le bon marché augmente