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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

lui-même ; c’est de prêter à un emprunteur distingué de tous les autres par la singularité de ses procédés. Cet emprunteur n’a pas dessein de faire un profit en employant le capital qu’on lui confie ; et même en général, il ne se propose pas de rembourser le principal de la dette qu’il contracte.

CAROLINE.

Il ne se propose pas de rembourser ! Et où trouvera-t-il quelqu’un assez facile pour prêter à de tels termes ?

MADAME B.

Cet emprunteur extraordinaire n’est autre que le gouvernement. Quand le gouvernement fait un emprunt, c’est pour dépenser le capital qu’on lui prête, aussitôt qu’il l’a reçu ; et les propriétaires du capital, ou les créanciers de l’État, s’attendent peu à voir leur créance acquittée. Malgré cela, il y a toujours assez de personnes disposées à prêter au gouvernement, et même à des termes plus favorables qu’à d’autres. Cela provient de deux causes ; la première est que le paiement ponctuel des intérêts de la part du gouvernement est plus assuré que de la part d’aucun particulier ; la seconde, que le créancier de l’État a un moyen indirect de retrouver son capital quand il lui plaît, sans que le gouvernement le lui rembourse.

CAROLINE.

Et comment ?

MADAME B.

En cédant le droit qu’il a d’en percevoir les intérêts à un individu, quel qu’il soit, qui est bien aise de placer son capital dans les fonds publics, et qui dès-lors prend la place du créancier primitif.

CAROLINE.

Et peut-il toujours vendre ce droit pour la somme entière qu’il a prêtée au gouvernement ?

MADAME B.

Pas toujours ; quelquefois plus, quelquefois moins, selon l’état du marché de ces fonds. S’il y a beaucoup de créanciers de l’État, ou de marchands de fonds publics, empressés à vendre, et peu de capitalistes prêts à acheter, le créancier en retirera moins à la