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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

CAROLINE lit.

« Je n’ai rien vu de respectable dans les petites propriétés, si ce n’est une activité sans relâche. Il faut ici que mes lecteurs se pénètrent de cette vérité, que, dans un très-grand nombre de cas, j’ai trouvé l’agriculture aussi mauvaise qu’on puisse l’imaginer, mais que l’activité laborieuse des propriétaires m’a paru si remarquable et si méritoire, qu’on ne peut en faire trop d’éloge. Cela prouve assez que la propriété du sol est l’aiguillon le plus pressant à un travail rude et soutenu. C’est une vérité frappante et si généralement applicable, que, pour mettre au labour le sommet d’une montagne, le moyen le plus sûr est de permettre aux villages voisins d’en acquérir la propriété. C’est ce qu’on voit en Languedoc, où les villageois ont porté, sur leurs dos, dans des hottes, au haut de leur montagne, de la terre propre à la culture, que la nature leur avait refusée. »

MADAME B.

La terre, trop pauvre pour donner une rente peut suffire à récompenser le propriétaire qui la cultive ; c’est donc uniquement la propriété qui, sur de tels sols, peut maintenir la culture. — Continuez.

CAROLINE lit.

« Mais dans les petites propriétés, il résulte de grands inconvénients de la division sans fin, qui a lieu à la mort du propriétaire. J’ai vu, par exemple, de grandes fermes de 40 ou 50 acres réduites de la sorte à un demi-acre, avec une famille, qui y était autant attachée que si elle avait été de cent acres. La population que produit cette extrême division n’est souvent qu’une multiplication de misère. Les hommes croissent en nombre au delà de ce qu’en demandent les villes et les manufactures ; la suite de cet ordre de choses est l’extrême détresse et la mortalité causée par les maladies qu’amène le défaut d’une bonne nourriture. Voilà comment les propriétés trop divisées deviennent une source féconde de malheur et de misère.

» En Angleterre les petites propriétés sont singulièrement rares. Nos pauvres qui travaillent ont avec raison l’ambition de devenir propriétaires de leur cabane, et du petit morceau de terre qui