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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

hommes, par ce motif-là, sont portés à placer leur capital dans les branches d’industrie qui donnent les plus gros profits ; et ces gros profits ont lieu dans les emplois du capital dont le pays a le plus besoin.

CAROLINE.

Je ne comprends pas très-bien pourquoi il y aurait toujours une parfaite coïncidence entre les besoins du public et l’intérêt du capitaliste ?

MADAME B.

Ceux qui composent le public sont disposés à payer au plus haut prix les choses dont ils ont le plus besoin. Supposons que le peuple manque de draps ; la concurrence des acheteurs en fait hausser le prix, les profits du fabricant en sont accrus. Que s’en suit-il ? Quelques personnes, qui font de moindres profits en cultivant la terre, transporteront leur capital dans les fabriques de drap. Il y aura de suite plus de draps fabriqués. On n’en manquera plus ; la concurrence de ceux qui en demandent sera réduite ; le prix baissera, et avec lui baisseront les profits de cette manufacture, jusqu’à ce qu’ils soient revenus au niveau de ceux de l’agriculture ; car s’ils baissaient davantage, le fermier retirerait son capital de la fabrique pour le reverser sur la terre.

CAROLINE.

Ainsi les profits de l’agriculture et des manufactures seront toujours, ou du moins tendront à être, sur un pied d’égalité.

MADAME B.

Oui ; tendront à être ; c’est une très-bonne expression, parce que ces changements ne sont jamais soudains. La tendance à égaliser les profits a lieu non-seulement en fait d’agriculture et de fabriques, mais en toute autre branche d’industrie. Dans un pays où le capital est laissé en pleine liberté de suivre son cours naturel, il coulera toujours dans le canal qui donne les plus grands profits, jusqu’à ce qu’enfin tous les emplois soient à peu près au même niveau.

CAROLINE.

À peu près, dites-vous ; pourquoi pas exactement ?

MADAME B.

Parce qu’en général les travaux de l’agriculture sont mieux as-