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sabine

son arrivée serait un aimant qui l’attirerait. Et ses yeux recommençaient à regarder ces murs dans lesquels elle accourait se cacher, s’abîmer, crier merci à la destinée, humilier son front entre les genoux de la vaillante femme dont elle se savait tant aimée.

C’était bien cette chère chambre qui sentait bon, où l’on n’avait jamais froid, où Renée lui mettait ses papillotes, et la coiffait elle-même pour qu’elle ne criât pas ; où elle aimait à s’imaginer qu’elle était née, se souvenant y avoir été apportée toute petite. Quel secret pressentiment l’y reconduisait ? Ah ! l’on ne pouvait le nier : l’existence recelait son fatalisme. À l’heure actuelle son mari connaissait certainement le passé ; l’infâme Varlon achevait d’accomplir son œuvre… peut-être la cherchait-il dans Paris… Du moins, il n’aurait pas l’idée de venir la surprendre à Sérigny. Mais lui, Henri ?… que pensait-il de son absence ? Renée l’avait-elle rencontré à temps ? En calculant l’heure de son départ, l’avant-veille, Sabine se répétait que Mme de Sérigny montait certainement le boulevard Haussmann à l’heure qu’elle désignait précisément à Henri pour son retour, à elle. Oui, il devait être sauvé, il ne pouvait pas ne pas l’être. Renée, prévenue depuis quelques jours, briserait les plus infranchissables digues. Et un allégement profond s’accomplissait dans son être.

Tous ses souvenirs la léchaient, la mordaient et tenaient bien au cerveau comme ses yeux. Jamais elle ne les avait trouvés aussi remueurs : colères