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était motivée par l’arrivée inopinée d’une autre femme, que dissimulait la portière de velours, et qui, depuis quelques secondes suivait d’un œil épouvanté le geste du peintre.

— Renée ! s’écria Henri, en l’apercevant enfin, et se laissant tomber épuisé sur l’ottomane. Renée, vous étiez donc là ? ah ! grand Dieu ! pourquoi nous avoir quittés ?

Sans répondre, elle l’enlaçait, de ses bras puissants, se souciant peu d’être surprise.

— Henri, est-ce bien vous que j’ai entendu ? Est-ce vous qui vouliez vendre vos œuvres à vil prix, renier votre carrière si noble, recommencer la vie ? Et pourquoi ? Qu’y a-t-il donc ? Comment, de mon départ à mon arrivée, une telle secousse a-t-elle pu se produire ? que s’est-il passé ?… parlez, oh ! parlez !…

Elle s’agenouilla près de lui, approcha ses lèvres de son oreille, et de cette voix qu’il n’entendait jamais sans frissonner, elle lui murmura :

— Dis-moi tout, comme autrefois…

Alors, écartant la chevelure qu’il avait tordue si souvent de ses doigts d’amant, le peintre, par un brusque revirement de pensée, plongea encore ses yeux dans ceux de Mme de Sérigny.

— Renée, cette femme qui sort d’ici…

— Eh bien ? fit-elle d’une voix rauque.

— Cette créature qui m’a frappé au visage… Sabine… oui, Sabine…

Et ses mains tremblaient.