Page:Marbeau Le charme de l histoire 1902.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
62
le charme de l’histoire

les institutions sociales. Les représentants de la loi étaient de fort petits personnages à côté des grands seigneurs et de ceux qui prétendaient passer pour tels. Un duc de Gramont cité devant le lieutenant de police, écrit des injures au lieu de comparaître. Un ancien lieutenant général des armées du Roi, « mylord Galloway », est cité pour certaines fredaines que ses 88 ans rendaient peu pardonnables ; dans la citation on avait omis par mégarde de mentionner « ses qualités ». Il vient à l’audience, « écoute tranquillement la mercuriale que le grave magistrat croit devoir lui faire en l’assaisonnant pourtant d’excuses ; puis répond qu’il avait ouï dire par le public qu’il était un faquin et un insolent et que ce n’était que pour en savoir le vrai qu’il s’était fait amener chez lui ; que sa conduite n’était pas soumise à un juge aussi subalterne, et qu’il ne lui convenait de penser à un homme tel que lui que pour faire nettoyer les rues, afin qu’il y pût marcher sans être éclaboussé ! M. Hérault fut forcé de boire le calice de cette réponse, et on m’assure même qu’il a été obligé d’aller chez mylord Galloway pour lui faire des excuses par ordre de M. le Cardinal. » Si ce dernier point est vrai, il faut avouer que le gouvernement prenait de mauvais moyens pour inspirer aux Français le respect des autorités constituées.

Les autorités constituées ! mot sans doute inconnu