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madame pape-carpantier

cherchait à poétiser, pour les faire aimer, le dessin linéaire et jusqu’aux mathématiques ! Pour elle, la ligne droite devenait l’emblème de la droiture ; la ligne courbe, celui de la douceur. La parabole était l’image vivante de l’âme humaine : tous les rayons qui partent de son foyer s’élancent vers l’infini ! Après cette leçon, comment ne pas se sentir pris d’une réelle sympathie pour la parabole ?

Ainsi, même pour arriver à l’instruction, elle s’attachait d’abord à l’éducation. Elle recommandait avant tout de former le cœur des enfants, de développer en eux la conscience, de leur faire aimer le devoir : « L’homme, disait-elle, n’est qu’une conscience vivante… Chacun fait son paradis à sa guise ! Le mien sera celui où tous les devoirs seront remplis, toutes les aspirations réalisées… Que les devoirs soient mesquins ou grands, tous sont également sacrés ; tous doivent être également chers ».

Elle voulait que l’enfant fùt bon : « La valeur d’un homme, disait-elle, est dans sa bonté ; c’est sur sa bonté que se mesurent tous ses titres à l’estime et tous ses droits au bonheur… L’amour des autres, ajoutait-elle, n’est pas un devoir ; c’est une consolation ». Béranger pensait comme elle. Un jour Chateaubriand se plaignait d’être fatigué de la vie. « C’est peut-être, lui répondit-il, que vous ne pensez pas aux autres ! » Quelle leçon pour tant de pauvres cœurs blessés qui restent tristes