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les contes de perrault

ou la répulsion, c’est ce qui transparaît de l’âme dans le regard, dans l’accent, dans le timbre de la voix. On plaît parce qu’on est bon, parce qu’on est indulgent, parce qu’on aime ; on plaît simplement parce qu’on a le désir de plaire ; ce désir n’est-il pas déjà par lui-même une qualité morale et une grâce ?


Riquet à la houppe met en scène la magie d’un autre sentiment. Le héros de ce conte est si spirituel qu’il doit se connaître en esprit ; sa princesse est si belle qu’elle a le droit d’être difficile sur la beauté. Mais tous deux ont reçu d’une bonne fée le don, lui, de trouver spirituelle la femme qu’il aimera, elle, de trouver beau l’objet de son amour. Ce don des fées, cette fleur magique qui enivre Titania, la nature souriante ne l’a-t-elle pas généreusement accordé à tous les hommes et à toutes les femmes ? Le grand enchanteur n’est-il pas, comme le dit Perrault, l’amour, ce magicien si invraisemblable dans ses rouvres que jamais les hommes n’ont consenti à attribuer ses effets à des causes naturelles, et que dans tous les pays, ils ont cru à des philtres, à des opérations magiques ? Dans l’objet aimé, c’est encore soi qu’on aime ; quand on lui prête toutes les grâces, c’est son propre rêve que l’on retrouve en lui. L’homme fait à l’image de son idéal toutes ses idoles, la femme qu’il aime