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le charme de l’histoire

êtes seuls pendant tout l’hiver. Que feriez-vous s’il vous arrivait quelque malheur ? — Dieu nous viendrait en aide ».

La solitude, qui met l’homme en présence de la nature, lui rend plus apparente la présence de Dieu. Réduit à combattre seul contre des forces irrésistibles, il cherche un appui, et il le trouve dans la Providence, qui a créé ces forces et qui a imposé des limites à leur puissance, un terme à leur durée.

Le pâtre est heureux et satisfait de son sort. Même au milieu du désert, « il ne se sent pas seul, puisque sa femme et ses enfants sont avec lui » (Le Pâtre). Sa tanya est à une heure de l’habitation la plus voisine. Il ne peut aller à l’église qui est trop loin, mais « sa femme prie quelquefois, et lui, il regarde les étoiles ». La maison a déjà été emportée deux fois par les eaux ; Dieu l’a aidé et il a pu la reconstruire. Le vent furieux menace de la renverser encore. Le pfttre, toujours calme, lutte contre la tempête, confiant que Dieu ne l’abandonnera pas, et certain que l’orage ne détruira pas tout, car, dit-il, « rien n’a jamais existé ».

À quels périls pourtant ne l’expose pas la solitude ?

Un soir, M. de Justh apprend qu’une famille habitant une tanya isolée a été empoisonnée par des champignons vénéneux. Il y court. « Nous