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allait à pied chercher à Blois des nouvelles et des journaux. C’est ainsi que l’on apprenait la fuite, l’arrestation ou la mort d’un parent, d’un personnage de la cour, du roi. Plus de visites d’amis ou de voisins. Deux fois des hôtes, qui avaient cherché refuge à Cheverny, y sont arrêtés et sont menés en prison ou à l’échafaud.

Puis viennent les réquisitions et les visites domiciliaires. Un décret ordonne que tous les titres féodaux seront brûlés. La municipalité s’empresse de faire une perquisition à Cheverny. Elle enlève du chartrier tous les parchernins qu’elle y découvre, et en fait un auto-da-fé sur la place de Cour un jour de décade. « Nous prîmes alors le parti de nous assembler dans le salon et de couper les parchemins qui restaient, pour en faire de la colle » (II. 163).

Un autre décret prescrit de désarmer les ci-devant nobles, les ci-devant seigneurs, leurs agents et domestiques. (26 rnars 1793). On réquisitionne le foin, la paille, l’avoine, les voitures, les chevaux, la toile, le chanvre, le drap, les vêtements, l’argenterie, les objets d’église, les cendres, les cochons. Ce dernier coup fut le plus sensible aux paysans ; tous s’empressèrent de tuer leur cochon et de le saler, pour n’avoir pas à le livrer. Chacune de ces mesures est le prétexte de vexations, de déprédations, de visites domiciliaires, qui de-