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EXTRAITS DE MARC-AURÈLE.

XXXIV

Si les matelots injuriaient le pilote, et les malades leur médecin, serait-ce à autre intention que de leur faire chercher un moyen de sauver, celui-ci ses passagers, celui-là ses malades[1] ?

XXXV

Le vain appareil de la magnificence, les spectacles de la scène, les troupeaux de petit et de grand bétail, les combats de gladiateurs, tout cela est comme un os jeté en pâture aux chiens, un morceau de pain qu’on laisse tomber dans un vivier ; ce sont des fatigues de fourmis traînant leur fardeau, une déroute de souris effrayées, des marionnettes mises en mouvement par un fil. Assistes-y donc avec un sentiment de bonté, sans orgueil insolent : réfléchis que la valeur de chaque homme est en raison de celle des objets qu’il affectionne.

XXXVI

Ne rougis point du secours d’autrui : le dessein que tu te proposes, c’est d’accomplir ton devoir, comme un soldat quand il faut monter sur la brèche.

XXXVII

Ne te trouble point de l’avenir : tu l’aborderas, s’il le faut, armé de la même raison dont tu te sers avec les choses présentes.

XXXVIII

Toutes choses sont liées entre elles, et d’un nœud sacré ; et il n’y a presque rien qui n’ait ses relations. Tous les êtres sont coordonnés ensemble, tous concourent à l’harmonie du même monde ; il n’y a qu’un seul monde, qui

  1. Ces matelots qui injurient le pilote, ce sont sans doute les sujets de Marc-Aurèle hostiles à quelqu’un de ses édits.