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SANS FAMILLE

— Vous faites plus de fautes aujourd’hui que vous n’en faisiez hier.

— J’ai tâché d’apprendre.

— Et vous n’avez pas appris.

— Je n’ai pas pu.

— Pourquoi ?

— Je ne sais pas… parce que je n’ai pas pu… Je suis malade.

— Vous n’êtes pas malade de la tête ; je ne consentirai jamais à ce que vous n’appreniez rien, et que, sous prétexte de maladie, vous grandissiez dans l’ignorance.

Elle me paraissait bien sévère, madame Milligan, et cependant elle parlait sans colère et d’une voix tendre.

— Pourquoi me désolez-vous en n’apprenant pas vos leçons ?

— Je ne peux pas, maman, je vous assure que je ne peux pas.

Et Arthur se prit à pleurer.

Mais madame Milligan ne se laissa pas ébranler par ses larmes, bien qu’elle parût touchée et même désolée, comme elle avait dit.

— J’aurais voulu vous laisser jouer ce matin avec Rémi et avec les chiens, continua-t-elle, mais vous ne jouerez que quand vous m’aurez répété votre fable sans faute.

Disant cela, elle donna le livre à Arthur et fit quelques pas, comme pour rentrer dans l’intérieur du bateau, laissant son fils couché sur sa planche.

Il pleurait à sanglots et de ma place j’entendais sa voix entrecoupée.