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cœur, tandis qu’un brouillard humide passait devant ses yeux.

— Reposez-vous et dormez, fit-il doucement.

— Mais vous, demanda Céleste, où allez-vous dormir, si je vous prends votre lit ?

— Ne vous en occupez pas. Bonne nuit.

Galfe prononça ces mots avec une certaine autorité pour vaincre l’hésitation de la jeune fille. Celle-ci, d’ailleurs, tombait de sommeil, un sommeil fait de l’accumulation de toutes ses fatigues antérieures : elle bégaya un « bonne nuit » dans un irrésistible bâillement et s’endormit profondément.

Le mineur la regarda longuement, soucieux, méditatif. Qu’allait devenir cette enfant, perdue dans la vie, guettée par toutes les embûches d’une société inexorable aux faibles et aux déshérités ? Lui-même ne gagnait que tout juste son pain, une partie de son salaire étant envoyée à son père, qui n’était pas au mieux à l’hospice de Jancy, une autre passant en achat de livres et brochures. C’était une charge inattendue qui lui tombait du ciel : il ne pouvait, cependant, après l’avoir arrachée à la mort, rendre cette enfant aux misères de la grande route. Enfin, on verrait.

Avec tout cela, il fallait qu’il prît lui-même un peu de repos, pour recommencer le lendemain matin sa vie de bête de somme. Il se fit un lit de feuilles sèches et ne tarda pas à s’endormir.

Galfe avait parfaitement oublié la réunion de la Mutuelle à laquelle, d’ailleurs, son intention au retour de la mine, n’était guère de se rendre.

Il ne se doutait pas que cette même nuit devait voir s’accomplir, dans le bois de Varne, des événements de haute importance.