Page:Malato - La Grande Grève.djvu/32

Cette page a été validée par deux contributeurs.

donc une gêne accidentelle et qui, il fallait l’espérer, serait de courte durée. Une ou deux paies rétabliraient l’équilibre.

Comme Geneviève était dans ses pensées, elle vit par la fenêtre se profiler une ombre ; elle leva la tête et reconnut l’abbé Firot, vicaire de Mersey, ambitieux jésuite de robe longue, joli cœur et coureur de cotillons, par-dessus le marché, qui déjà avait essayé — mais vainement, — de lui faire la cour.

— Madame Détras, je vous salue bien, fit doucement l’abbé Firot.

Geneviève avait éprouvé une sensation d’agacement en le reconnaissant. Elle lui répondit cependant d’un : « Monsieur l’abbé… », accompagné d’une inclinaison de tête. La route est à tout le monde et elle ne pouvait empêcher le vicaire de passer devant sa maison.

— Voulez-vous me permettre d’entrer vous dire un mot ? demanda l’abbé Firot.

Cette prière indiscrète, mais formulée d’un ton discret, remplit de malaise la femme du mineur. Elle eût voulu éviter une guerre en règle avec les prêtres, sachant bien que dans semblable guerre on ne pouvait être que broyé.

Aussi, à l’astuce ecclésiastique, opposa-t-elle sa finesse féminine.

— Dites, monsieur l’abbé, fit-elle.

Elle avait répondu « dites » et non « entrez », éludant une acceptation ou un refus.

L’abbé Firot sentit l’habileté et sourit. Un instant, il eut l’idée d’insister ; mais il se retint, pensant qu’il risquait d’amener chez la jeune femme une démonstration plus caractérisée d’hostilité. Avant tout, il fallait gagner sa confiance.

— Soit, fit-il, en simulant la franche gaîté, puisque vous ne voulez pas me recevoir…

Il s’interrompit une seconde, le temps de permet-