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gée de foin : non loin picoraient des poules et, en approchant, on eût pu entendre tinter les grelots des vaches.

C’était la ferme de Pierre Mayré, le plus notable habitant de la localité.

Trapu, l’œil vif, brillant dans une figure rougeaude que couronnait une rude chevelure poivre et sel, court taillé, ce villageois offrait le type du paysan robuste et madré.

En ce moment, armé d’une fourche, il enlevait les bottes de foin de la voiture pour les lancer dans la cour où elles formaient un monceau déjà respectable.

Au fond de la cour, une grosse et laide fille de ferme, assise sur un banc, plumait un coq récemment égorgé.

Céleste arriva devant cette ferme où tout annonçait le confort rustique et, bien qu’elle fût lasse d’avoir marché pendant de longues heures, l’estomac vide, car les baies de la forêt ne pouvaient compter pour un repas, elle se redressa, s’efforça de prendre un air sinon gai, du moins assuré. Elle savait que les satisfaits n’aiment ni les figures tristes ni les corps languissants.

— Pardon, monsieur, fit-elle en s’approchant du paysan, est-ce vous le maître de cette ferme ?

Mayré dévisagea l’arrivante d’un regard soupçonneux.

— Qu’est-ce que vous voulez ? demanda-t-il, sans répondre lui-même à la question.

— Je voudrais du travail. Si l’on a besoin de quelqu’un…

— Du travail ? interrompit le fermier. Non, nous n’avons besoin de personne.

Céleste s’attendait à cette réponse. Elle n’en ressentit pas moins un serrement de cœur.

— Je ferai n’importe quel travail, insista-t-elle.

La servante qui plumait le coq avait interrompu