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traverser la chaîne des Oébias et le massif du Thô-non, car, sur le versant est, comme sur le versant nord, la plupart des cours d’eau contiennent des paillettes. Trois ans plus tard, Louise Michel et moi formions le projet, inexécuté, de parcourir à pied la côte, par le sud et l’est, de Nouméa jusqu’à Hienghène pour, de là, remonter dans l’intérieur, explorant les massifs de la chaîne centrale et déterminant le point de partage des eaux. Il est présumable que cette crête contient des richesses aurifères dont le Diahot et les rivières de l’est dérobent quelques parcelles. Je dois dire, — le lecteur me croira s’il veut, — que la perspective des richesses métalliques, enfouies dans les flancs de montagnes presque inaccessibles, nous tentait beaucoup moins que le pittoresque de ce voyage, auquel les circonstances nous contraignirent de renoncer.

Il serait presque impossible aux Européens et même aux indigènes de voyager pédestrement à de longues distances, si le bichelamare (langage des pêcheurs de l’holoturie ou biche de mer) ne leur permettait de s’entendre moins incomplètement que par signes. C’est un patois hétérogène, comprenant de l’anglais de cuisine, du français estropié et des mots empruntés à tous les idiomes du Pacifique. Maints déportés qui, après l’amnistie, ont écrit des mémoires, parfois inexacts, et cela se comprend car, outre qu’ils ne pouvaient voyager librement, ils devaient voir le pays de parti pris, se sont imaginé, par exemple, que les mots tayo (homme), popiné (femme), picanini (enfant), etc., étaient du plus pur dialecte néo-calédonien. C’est une erreur complète : le premier mot est taïtien ; le second, également d’origine polynésienne, semble une corruption de Huahiné ; le