Page:Malato - De la Commune à l'anarchie, Tresse et Stock, 1894.djvu/82

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tribu, accrue bientôt par des mariages et par l’arrivée constante de Nouméas échappés aux vainqueurs. Bientôt les exilés purent goûter, avec les douceurs de la vengeance, les tibias de leurs ennemis, plat éminemment national, — car, de temps en temps, ils franchissaient la chaîne centrale pour tomber sur les Kamb’was sans défiance.

Damê s’était tellement relevé qu’il finit par inspirer de sérieuses appréhensions à ses voisins, vis-à-vis desquels, cependant, il s’était toujours comporté avec beaucoup d’honnêteté. Deux petites tribus, celles des Tyas et des Dodgis, se liguèrent contre lui et, une nuit, tombèrent sur les nouveaux villages des Nouméas, tuant et incendiant partout. Damê, qui, décidément au milieu même de ses adversités, jouait de bonheur, fut réveillé juste à temps par un des siens qui lui cria : « N’gon tôté, oushiot dé Dodgi iêt ghé ! » phrase mélodieuse qui signifie en pur dialecte touaourou « Vous, maître, levez-vous ! les Dodgi nous frappent ! » Le grand chef rassembla en hâte quelques-uns des siens, parmi lesquels Capéia, — Sésagni mangeait depuis longtemps les taros par la racine, — et gagna la forêt de Coronourou. Le lendemain avant le jour, Kaâté, informé sans retard, car le télégraphe n’existait pas encore, accourut avec ses guerriers au secours de son ami et Damê prit le commandement général en prononçant ces paroles mémorables : « Ils nous ont frappés de nuit et par surprise : nous les frapperons de jour et en face. » En deux combats, les traîtres furent exterminés : les survivants s’enfuirent dans leurs pirogues, les Dodgis à l’île Ouen, les Tyas à Kunié.

On pourrait arrêter là cette histoire de Damê, mais