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entre les mains de vrais révolutionnaires, prêts à travailler pour une idée et non pour des appointements, ayant assez de tact pour ne s’adresser qu’à la masse en évitant les rengaines d’écoles, quelle force ! Toute la succession du Cri du Peuple était à prendre. Pouget et moi courûmes chez Roques, qui nous reçut bien sans s’engager : notre malheur fut d’y retourner avec quelques camarades soupçonneux et cassants. Une rédaction panachée, improvisée à la hâte, romantique et très vide à l’exception de deux ou trois, nous dama le pion. Nous devions nous retrouver en prison avec les meilleurs d’entre eux.

L’Égalité vécut encore une année, tirant de l’aile, n’ayant plus pour rédacteurs sérieux que Zévaco et Odin, — je ne parle pas de l’algébriste Chirac, qui se prenait lui-même pour prophète et, à la veille des manifestations belliqueuses invitait la foule à livrer aux policiers les perturbateurs !

Quand l’Égalité fut morte, le marquis de Morès, catholique à tempérament révolutionnaire, avec lequel la prison nous avait mis, Gegout et moi, en relations fort courtoises fit proposer à quelques anarchistes, dont je fus, de créer ensemble un journal de combat, et antisémite, proposition que nous déclinâmes. La main ultramontaine apparaissait trop visiblement ; or, si nous luttions contre la république bourgeoise ce ne pouvait être au profit de la réaction cléricale, chauvine et monarchique. Quelque temps après, La Libre Parole parut et, rééditant la vieille tactique de 1789 et 1848, mina, sous le masque avancé, toutes les idées d’émancipation.

Le réveil clérical est très curieux à étudier depuis l’année 1888. Il est indéniable que le boulangisme fut un mouvement en partie double ou même triple, —