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de prodigieuses dispositions pour la chasse et l’équitation, mais aucune pour l’étude ; ce fut en vain que je tâchai de l’initier à la syntaxe ou à des sciences quelconques : il ne voulait connaître que le sport !

J’administrais, à ce moment, le télégraphe, la poste, le timbre et enregistrement, le domaine, le port et la caisse de l’État, — un maître-Jacques rond-de-cuir ! La force armée était même sous ma direction, quarante guerriers canaques, commandés par le chef de guerre Simon devant croiser la sagaïe à ma première réquisition. J’eus la sagesse de laisser tous ces bras à l’agriculture.

Parti de l’exil volontaire, j’étais devenu peu à peu une sorte de roitelet, représentant dans ce district perdu le gouvernement français qui, avec la logique des gouvernements passés, présents et futurs, devait, plus tard, m’expulser comme étranger. J’eusse pu être très inconstitutionnel, et le seul reproche que m’adressaient les colons de la localité, était de ne point assez faire sentir mon autorité en m’immisçant dans leurs affaires. Devant ma persistance réitérée à me confiner dans mes services suffisamment multiples, ces amoureux de l’esclavage adressèrent, peu avant mon départ, une pétition au gouverneur pour qu’il leur octroyât des gendarmes : leurs désirs ont été exaucés.

Le père Morris, seul, me boudait. Ce missionnaire, pour mieux asseoir son influence sur les indigènes, les avait convaincus qu’il travaillait papier, — autrement dit, était en correspondance, — avec le bon Dieu. Avant mon arrivée, il ne manquait pas d’envoyer, chaque jour au télégraphe un messager chargé de lui rapporter non verbalement, et pour cause, les indications barométri-