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gea le chef de poste et que j’expédiai séance tenante : ce fut la première dépêche envoyée par un Néo-Calédonien.

L’incurable Koïma étant revenu non à la santé, mais à sa tribu, celle-ci se mit en devoir de célébrer sa réapparition par un pilou monstre auquel furent conviées toutes les peuplades du littoral nord-est. Depuis plusieurs jours, les Pouébos, les Pemboas, les Bondés, les Aramas, ne faisaient que défiler sur la route, tatoués, coiffés de plumes blanches et vêtus (?) de leurs plus neufs moinôs ou de leurs plus belles ceintures ; leurs femmes, selon leur fonction de bêtes de somme, portaient des provisions et des nattes, de quoi camper au moins une semaine.

À la fin, je me laissai tenter. Il fut convenu, pour donner du piquant à la chose, que nous prendrions part au pilou, déguisés en Canaques. Un militaire, nommé Pinson, se joignit à nous sans en demander l’autorisation à son chef : s’il ne fût tombé sous les prescriptions de l’homicide docteur, Pinson serait peut-être devenu anarchiste !

Lui et Victor Hook partirent les premiers, emportant un quartier de porc frais et deux bouteilles de vin, car c’était le cas de se répéter : « Mangeons ! nous ne savons qui nous mangera ». Dès huit heures du soir, je me mis en route pour les rejoindre, suivant rapidement la côte, car la marée était basse : tout au loin, brillaient déjà les feux des Canaques.

J’arrivai dans la case où nous nous étions donné rendez-vous ; un bon feu y flambait, éclairant un groupe de dormeurs : un Européen et deux Néo-Hébridais, arrivés devant Diahoué en embarcation et descendus pour se ravitailler. Une vieille popiné, compagne intermit-