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liv. iv.
ARTS AGRICOLES : DE LA BOULANGERIE.


sulfate,le pain devient plus humide, il acquiert par là une couleur moins blanche.

En faveur de la propriété qu’a le sulfate de cuivre de raffermir la pâte, on peut facilement obtenir un pain bien levé avec des farines dites lâchantes ou humides. L’augmentation en poids du pain, par suite d’une plus grande quantité d’humidité retenue, peut s’élever jusqu’à 1/16e ou une once par livre, sans que la qualité du pain en souffre. C’est surtout en été que le besoin de raffermir les pâtes et de les empêcher de pousser plat se fait sentir. On y parvient habituellement par l’emploi du levain et du sel marin ; mais l’action d’une très petite quantité de sulfate de cuivre peut dispenser de faire entrer l’un et l’autre de ces produits dans la pâte, mais dès lors il devient nécessaire d’augmenter un peu la quantité de levure.

L’action du sulfate de cuivre est plus favorable au pain blanc qu’au pain bis ; ce dernier, humide par sa nature, le devient encore davantage pour qu’on y mette de ce sulfate.

La quantité de sulfate la plus grande qui puisse être employée sans altérer très sensiblement la qualité du pain, est celle de 1/4,000 ; passé cette proportion le pain est très aqueux, à grands yeux, et avec 1/1,800 de sulfate de cuivre, la pâte ne peut nullement lever, toute fermentation semble arrêtée, et le pain acquiert une couleur verte. En supprimant, dans ce dernier cas, l’emploi du levain et en mettant plus d’eau dans la pâte, le pain lève bien , il devient très poreux , avec de grands yeux ; mais il est humide, verdâtre et a une odeur de levain très prononcée et très désagréable.

Il me paraît évident que dans le sulfate de cuivre c’est bien moins l’acide que la base qui influe sur la panification ; car le sulfate de soude, le sulfate de fer, et même l’oxide sulfurique, ne m’ont donné dans des essais comparatifs aucun résultat analogue.

II. — De l’alun, de son emploi dans la boulangerie et des moyens d’en reconnaître la présence dans le pain.

Je ne sais à quelle époque peut remonter l’usage de l’alun dans la fabrication du pain ; cet usage paraît être fort ancien, et adopté presque généralement à Londres.

Voici ce que disent sur cet objet les différens auteurs anglais qui se sont occupés d’hygiène. M. Accum, dans son traité sur les poisons culinaires, dit que la qualité inférieure de la fleur de farine dont les boulangers de Londres font habituellement usage pour la fabrication du pain rend nécessaire l’addition d’alun, afin de donner au pain le coup d’œil blanc du pain fait avec de la belle fleur.

Cet emploi d’alun semble permettre de mêler à la fleur de la farine de fèves et de pois, sans nuire à la qualité du pain ; selon le docteur Ure, la moindre quantité d’alun nécessaire pour produire avec une farine de qualité inférieure un pain léger et poreux, est de 113 grammes pour 109 kilogrammes de fleur.

Le docteur P. Markham, dans ses considérations sur les ingrédiens que l’on emploie pour fraude sur la fleur de farine et le pain porte la quantité d’alun employé à 240 gram. sur 109 kil.de fleur.

Enfin, cette quantité d’alun est encore employée dans la proportion de 1 kil. pour 127 kil. de fleur, donnant 80 pains de 4 livres, ou 12,40 gram. d’alun par pain. (Art. boulangerie du supplément de l’Encyclopédie Britannique.)

Cette quantité d’alun paraît devoir varier selon la quantité des farines employées, et remplace en tout ou en partie le sel marin qui entre ordinairement dans la confection du pain.

Dans les diverses proportions données, la quantité d’alun varie de 1/127 à 1/974 de la farine employée, ou de 1/145 à 1/1077 du pain obtenu.

L’action de l’alun sur l’économie animale n’est pas à comparer pour son énergie à celle du sulfate de cuivre, aussi la présence d’une petite quantité d’alun dans le pain ne pourra pas facilement occasionner des accidens immédiats ; cependant il est à craindre que ce sel n’exerce une action funeste par son introduction journalière dans l’estomac, surtout chez les personnes d’une constitution faible.

Il sera facile de reconnaître la présence de ce sel dans le pain, en suivant le procédé décrit par le docteur Ure, dans son Dictionnaire de chimie, vol. IV, et qui consiste à faire agir un sel de baryte sur l’eau distillée, dans laquelle on a émietté le pain. Ce procédé ne déterminant que la présence de l’acide sulfurique, et par suite d’un sulfate quelconque, il peut être utile dans des recherches de ce genre d’avoir recours à l’incinération. La grande quantité , et surtout le volume des cendres, servira déjà d’indices. Il faut toujours avoir égard à la petite quantité d’alumine que peuvent contenir les cendres de quelques céréales. La présence de quelques traces de cette base a été reconnue dans les cendres de seigle par Schrader.

Les résultats de l’emploi de l’alun dans la fabrication du pain sont à peu près les mêmes que ceux obtenus avec le sulfate de cuivre, mais ce sel agit avec beaucoup moins d’énergie à dose égale. Ainsi, 1/3,500 de sulfate de cuivre est une bien trop grande proportion, à tel point qu’au lieu de favoriser la levée de la pâte, on la diminue. Cette même proportion d’alun ne produit encore aucun résultat apparent. Pour obtenir un effet sensible, il a fallu élever la quantité d’alun à 1/686 ; à la dose de 1/176, l’effet a été plus remarquable.

Il est possible cependant qu’une beaucoup plus grande quantité d’alun puisse, comme un excès de sulfate de cuivre, arrêter le gonflement de la pâle. L’action qu’exerce l’alun sur la pâte est absolument la même que celle du sulfate de cuivre ; il retient, pour me servir d’un terme usité par les boulangers, et fait pousser gros.

§III. — Sulfate de zinc.

Le sulfate de zinc, ou vitriol blanc, paraît aussi avoir été mis en usage par les boulangers pour faciliter la levée du pain ; peut-être ce sel a-t-il été confondu avec le sulfate de cuivre, vitriol bleu. Voici un moyen analytique que j’ai mis en usage pour déceler la présence de ce sel éminemment vénéneux.