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liv. iii.
ANIMAUX DOMESTIQUES : PATHOLOGIE.


§ VII.— Effort (entorse).

Tiraillement douloureux, distension violente des muscles, des tendons, et surtout des ligamens qui unissent les os entre eux, survenue soit à la suite des efforts, ou des actes de force auxquels les animaux se sont livrés pour triompher d’une résistance ou pour porter des fardeaux, soit à la suite des faux pas, des glissades, des chutes, de l’action de se relever, etc. On distingue les efforts d’après les régions qui en sont le siège.

Effort d’épaule, écart, entr’ouverture, distension scapulo-humérale. J’ai fait connaître plus haut (F, § 1er), la manière de procéder à l’examen des chevaux boiteux, et, par suite d’arriver à reconnaître les écarts ; je ne reviendrai pas sur ces détails. — Les écarts passent généralement pour des affections graves et fort difficiles à guérir. Si je ne consulte que ma propre expérience et surtout celle de mon père qui, dans une pratique de trente années, a compté, relativement à cette maladie, à peu près autant de succès que de traitemens, je serais porté à tenir un langage tout à fait opposé. Pour arriver à de pareils succès, il ne faut pas craindre d’attaquer vigoureusement les écarts aigus dès leur début, par un traitement révulsif énergique. Pour remplir cette indication, mon père s’est servi avec beaucoup de bonheur des frictions de teinture de cantharides sur l’épaule. Voici la manière de préparer cette teinture qui, chez les pharmaciens et les droguistes, est presque toujours trop faible.

Dans une bouteille ordinaire on met deux onces de cantharides en poudre, et deux onces d’euphorbe également pulvérisée ; on emplit la bouteille d’eau-de-vie à 22°, on la bouche avec soin, on l’agite et on l’expose à l’action dune douce chaleur pendant trois à quatre jours. Il y a deux moyens fort simples d’obtenir la température nécessaire. Le premier consiste à enfouir la bouteille dans du fumier en fermentation ; le second, à placer ce vase sur le four d’un boulanger. On conserve pour l’usage cette teinture que l’on décante au fur et à mesure des besoins.— Voici maintenant, d’après mon père, les règles que je suis dans l’emploi de cette teinture. — Un écart aigu étant reconnu, je fais sur toute l’étendue de l’épaule malade, depuis le garrot jusqu’à la distance de trois à quatre pouces de l’articulation du bras avec l’avant-bras, une friction avec six onces du médicament en question. Cette friction doit être faite lentement, avec beaucoup de soin et concentrée particulièrement à la partie supérieure et à la pointe de l’épaule. La partie ne doit pas être dénudée de ses poils qui font office d’éponge et retiennent la liqueur appliquée sur la peau. Je mets près d’une demi-heure à faire cette friction qui, je le répète, ne saurait être faite avec trop de soin. On recommande de se couvrir la main avec une vessie afin d’éviter l’absorption des principes actifs des cantharides, et les accidens qui pourraient en être la suite ; je déclare avoir constamment omis cette précaution, et n’avoir jamais eu à m’en plaindre. La friction étant terminée, le cheval doit être attaché au ratetier, dans un endroit où il ne puisse ni se coucher ni se frotter. Douze heures après cette friction, on en fait une seconde avec les mêmes soins et la même quantité de teinture ; ou en fait une troisième douze heures après la seconde, et tout est fini : il n’y a plus alors qu’à attendre l’effet du traitement. Ainsi, il suffit de trois frictions en vingt-quatre heures avec dix huit onces de teinture de cantharides. Ce traitement donne lieu à un engorgement considérable de la partie frictionnée, et à la formation d’un grand nombre d’ampoules, qui ne tardent pas à crever. On tient le cheval attaché au râtelier pendant une semaine. Dix à douze jours après les frictions, les poils commencent à tomber par larges plaques croûteuses, mais ne tardent pas à être remplacés par d’autres poils ; et quinze à dix-huit jours après le commencement du traitement, le cheval est ordinairement guéri. Il arrive parfois que ce traitement ne donne pas lieu à une guérison complète, mais seulement à une diminution notable de la boiterie. Dans ces cas, assez rares, on recommence le traitement sur nouveaux frais, et après ce second traitement, la boiterie est le plus souvent disparue.

L’efficacité de la méthode que je viens de faire connaître, le peu de douleur qu’elle occasionne aux animaux, la brièveté du traitement, doivent engager les praticiens à la mettre en usage, de préférence aux saignées, aux émolliens, aux frictions spiritueuses qui, trop souvent, laissent passer la maladie à l’état chronique.

Effort de genou. Cet effort est caractérisé par le gonflement, la chaleur, la douleur du genou malade, et une boiterie plus ou moins forte. L’expérience m’a prouvé dans maintes circonstances que l’on pouvait facilement triompher de cet accident à l’aide du traitement suivant : 1° à l’effort léger et récent opposer les bains froids, longtemps prolongés et fréquemment répétés, les frictions avec l’eau-de-vie camphrée et le repos ; 2° traiter les efforts récens et graves, c’est-à-dire accompagnés d’une boiterie intense, par des frictions avec la teinture de cantharides dont j’ai donné la formule en décrivant le traitement de l’écart. Trois frictions faites dans les vingt-quatre heures, c’est-à-dire à douze heures d’intervalle, suffisent habituellement. Il faut employer dans ce traitement toutes les précautions que j’ai fait connaître au mot Ecart auquel je renvoie pour éviter des répétitions. 3° Les efforts chroniques sont fréquemment traités avec succès par les frictions de teinture de cantharides ; mais l’application du feu en raies réussit généralement mieux.

L’effort de boulet (mémarchure) ; 4° l’effort de cuisse (allonge, effort de hanche) ; 5° l’effort de grasset ; 6° l’effort de jarret ; 7° le tour des reins, réclament absolument le même traitement que l’écart et l’effort de genou.

§ VIII. — Exostose (tumeur dure).

Tumeur osseuse développée à la surface d’un os. Les exostoses se manifestent plus particulièrement sur les parties qui avoisinent de très-près les articulations ; elles sont susceptibles de plusieurs variétés relatives à leur forme, leur volume, leur nombre, leur situa-