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chap. 2e.
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Sols sableux.

lans, comme amendement et comme fumure des terres trop légères.

Les fumiers qui conviennent le mieux dans ces sortes de terres sont en effet ceux qui contiennent et qui conservent le plus d’humidité. — C’est pour cela qu’on préfère à tous autres celui des bêtes à cornes, et qu’on a préconisé avec autant de raison, au moins, que pour les terres argileuses, l’enfouissement des récoltes vertes. — Les engrais très-actifs ont, en général, sur les sables une action d’autant moins favorable, que ces derniers sont plus secs et plus chauds. L’expérience de tous les temps est à cet égard d’accord avec la pratique de tous les lieux.

I. Terres sablo-argileuses. Elles viennent naturellement se placer à côté des terres franches, dont elles ne diffèrent que parce que la proportion du sable siliceux qu’elles contiennent l’emporte sur celle de l’argile.

En pratique, le passage des unes aux autres est inappréciable, et ce que j’ai dit des premières se rapporte encore aux secondes. Tant que le sable ne domine que faiblement, le mélange change à peine d’aspect ; mais, à mesure qu’on s’éloigne du point moyen, où les sols argilo-sableux se confondent avec les terres sablo-argileuses, il devient assez facile de distinguer ces dernières. Humides, elles sont moins boueuses ; — sèches, elles offrent moins d’adhérence. La simple pression des doigts peut les réduire en une poussière grenue et rude au toucher.

Tantôt, quelle que soit leur origine, elles sont éloignées des grands cours d’eau, ou, ce qui revient au même, insubmersibles par eux ; — tantôt elles proviennent d’alluvions récentes des rivières et des fleuves, et sont sujettes aux inondations.

Dans l’un et l’autre cas, elles doivent à leur légèreté plus grande quelques avantages de plus que les terres franches ; également favorables à toutes les cultures qui réussissent sur ces dernières, elles peuvent l’être encore à celles des chanvres, des lins, et de divers végétaux qui aiment comme eux les sols légers et pourtant substantiels. L’analyse d’un sol de cette nature qui venait de produire en Touraine un beau chanvre a donné :

Sable grossier 
 49
Argile 
 26
Calcaire 
 25

Ni trop compactes, ni trop meubles, ces terres sont également perméables aux pluies, à l’air atmosphérique et aux faibles chevelus des plantes délicates. — Elles absorbent l’eau, s’en pénètrent, sans jamais s’en imbiber outre mesure ou la retenir en nappes comme les argiles. — Elles s’échauffent au printemps moins promptement que les terres purement sableuses, mais plus facilement que les sols argileux, et, presqu’autant que ces derniers, elles conservent leur humidité à l’époque des chaleurs. — Enfin, pour citer encore un seul de leurs autres avantages, elles sont, par suite des propriétés que nous venons de leur reconnaître, dans l’état le plus favorable à la décomposition des engrais, puisqu’elles les entourent presque constamment pendant l’époque de la végétation, d’une humidité chaude et modérée, et qu’elles laissent l’oxigène de l’air pénétrer facilement jusqu’à eux. — Par cette dernière raison, elles exigent de moins fréquens labours. Ceux qu’on leur donne sont faciles, et l’on est presque toujours à même de les donner en temps opportun. — Tous les engrais conviennent à ces sortes de terres. Elles ne sont point assez froides pour retarder les bons effets des fumiers peu décomposés, pas assez chaudes pour rendre dangereux les effets des fumiers actifs. Pour peu qu’elles aient un peu de fond, elles se prêtent encore à l’emploi modéré de la chaux. En un mot, dans des circonstances favorables, on peut les regarder presqu’à l’égal des suivantes, comme types des meilleures terres.

Les terres sablo-argileuses d’alluvion récente et submersibles sont fréquemment recouvertes, à l’époque des inondations, d’une couche souvent assez épaisse, d’un limon qui a été tenu plus ou moins long-temps en suspension dans les eaux, et transporté par elles parfois à de fort grandes distances. — La nature de ce limon varie nécessairement en raison de celle des terrains que dépouillent les cours d’eau auxquels il doit sa formation. Onctueux, doux au toucher, il contient ordinairement, en quantité prédominante, de l’argile, d’autres fois du calcaire, toujours beaucoup d’engrais et de substances végétales à divers degrés de décomposition. En se mêlant progressivement par suite des labours aux sols qu’il recouvre, il leur communique en partie ses propriétés fécondantes, et conserve avec eux le nom de terres limoneuses, terres de vallées, etc.

Il n’est personne qui n’ait entendu vanter la fécondité prodigieuse des terres limoneuses des bords du Nil, et les effets remarquables des débordemens annuels de ce fleuve. — S’il menace de loin en loin de ne pas sortir de son lit, l’Égypte redoute une famine. — L’autorité prend des mesures extraordinaires pour prévenir les suites d’un tel événement. — En France, nous avons aussi des terres limoneuses d’une fertilité qui ne peut être bien appréciée que par ceux qui les ont vues couvertes de leur luxueuse végétation, et surtout qui ont été à même de les cultiver. — Telles sont celles de la plupart des îles et des rives de notre belle Loire. — Sur divers points, les cultures épuisantes du lin, du froment et du chanvre, peuvent s’y succéder sans interruption et donner constamment, à l’aide de fumures moyennes, d’admirables produits. — Aux céréales d’automne, qui sont fréquemment submergées et détruites par les inondations d’hiver, on est souvent dans l’obligation de substituer celles de printemps ; aussi en sème-t-on rarement au-delà du besoin de chaque famille, la terre étant plus avantageusement occupée par les plantes textiles. — Les lins y sont de qualité supérieure ; on a commencé à introduire ceux de Flandre, qui, loin de se détériorer, semblent au contraire s’améliorer. — Quant à la culture des chanvres, elle y prend annuellement plus d’extension à mesure que le commerce apprécie davantage la bonté de ses produits. — Dans ces sols favorisés le besoin des prairies artificielles se fait rarement sentir ; car chaque coin de terre, dès qu’il est abandonné sans cultures, se couvre de riches pâturages.