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LE CHIEN DE TERRE-NEUVE.


(Tête du chien de Terre-Neuve.)


ANECDOTES.

Celte race de chiens est une des plus intéressantes par les bonnes qualités dont elle est éminemment pourvue, et qui semblent lui être tellement particulières, que l’on trouve rarement des individus qui ne les manifestent point d’une manière assez remarquable. Il y a peut-être encore, au nord de l’ancien continent, des chiens de plus grande taille ; on pourrait aussi essayer de régénérer la race gigantesque des chiens d’Épire, dont Pline a fait une description si poétique ; mais ce qui est véritablement précieux pour l’homme, c’est un compagnon qui lui soit entièrement dévoué, qui le défende contre les brigands, le retire du fond des eaux lorsqu’il y est tombé, partage ses fatigues et ses périls, et parvienne souvent à lui sauver la vie. Le chien de Terre-Neuve est peut-être plus qu’aucun autre de son espèce, ce compagnon, cet ami dans les circonstances les plus difficiles ; on peut compter sur son courage et sur son intelligence, dont il donne quelquefois des preuves auxquelles on était loin de s’attendre. Citons quelques faits où ces belles qualités ont excité à la fois l’intérêt et la curiosité.

Le Durham, paquebot de Sunderland, avait fait naufrage sur les côtes de la province de Norfolk, près de Clay. L’équipage et les passagers ne pouvaient être sauvés qu’en établissant une amarre entre le bâtiment et la terre ; mais la côte était beaucoup trop éloignée pour qu’on pût y lancer un cordage, et la tempête trop violente pour qu’aucun matelot osât rendre à ses compagnons d’infortune le périlleux service de porter ce cordage à terre. Heureusement pour ces naufragés, il y avait à bord un chien de Terre-Neuve ; ce fut à cet animal que l’on confia l’aventureuse commission. On lui mit dans la gueule le bout de la corde de sauvetage, et il s’élança au milieu de l’épouvantable fracas des lames qui se brisaient l’une contre l’autre. Il avait déjà fait une grande partie du trajet, lorsque ses forces commencèrent à l’abandonner, sans que pourtant il lâchât le bout du cordage. Deux marins intrépides, qui se trouvaient alors sur la côte, avaient admiré les persévérans efforts de ce chien ; ils virent sa détresse, et ne balancèrent point à s’exposer eux-mêmes pour le secourir. Ils l’atteignirent en effet au moment où il allait succomber, prirent la corde qui était entre ses dents, l’aidèrent à gagner le rivage, et alors on put sauver les neuf