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LA GRANDE FORÊT conformément aux prévisions de Darwin1. Si les anthropologistes ont pu dire que les plus élevés des quadrumanes dans l’échelle simienne, ceux qui se rapprochent davantage de la conformation humaine, en diffèrent cependant par cette particu­ larité qu’ils se servent de leurs quatre membres, quand ils fuient, il semblait bien que cette remarque n’aurait pu s’appliquer aux habitants de ce village aérien. Mais Khamis, Max Huber, John Cort durent remettre à plus tard leurs observations à ce sujet. Que ces êtres fussent ou non d’un rang intermé­ diaire entre l’animal et l’homme, leur escorte, tout en conversant dans un idiome incompréhensible, les poussa vers une case au milieu d’une foule qui les regardait sans trop de surprise. Une porte fut refermée sur eux et ils sc vi­ rent bel et bien emprisonnés. « Parfait’.... déclara Max Huber. Et, ce qui m’étonne le plus, c’est que ces ètres-là n’ont pas eu l’air étonné en nous voyant... — Reste à savoir, reprit John Cort, s’ils ont l’habitude de nourrir leurs prisonniers... — Ou s’ils n’ont pas plutôt celle de s’en nourrir ! » ajouta Max Huber. Et, en effet, puisque, dans les tribus de l’Afrique, les Moupbouttou et autres se livrent 1. C’est dans le quaternaire inférieur de Sumatra que M. E. Dubois, médecin militaire hollandais à Batavia, a trouvé un crâne, un fémur et une dent en bon état de conservation. La contenance de la boîte crânienne étant très supérieure à celle du plus grand gorille, inférieure à celle de l’homme, cet être paraît réelle­ ment intermédiaire entre l’anthropoïde et l’homme. Aussi, pour établir les conséquences de cette décou­ verte, est-il question d’un voyage à Java qui serait entrepris par un jeune savant américain, le docteur Walters, qui serait commandité par le milliardaire Vanderbilt.

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encore aux pratiques du cannibalisme, pour­ quoi ces êtres, qui ne leur étaient guère infé­ rieurs, n’auraient-ils pas eu l’habitude de manger leurs semblables— ou à peu près ?... Dans tous les cas, qu’ils fussent des anthro-

poïdes d’une espèce supérieure aux orangs de Bornéo, aux chimpanzés de la Guinée, aux gorilles du Gabon, les quadrumanes qui confi­ nent de plus près à l’humanité, cela n’était pas contestable. En effet, ils savaient faire du feu et l’employer à divers usages domes­ tiques : tel le foyer au premier campement, telle la torche que le guide avait promenée à travers ces sombres solitudes. Et l’idée vint alors que ces flammes mouvantes, signalées sur la lisière, pouvaient avoir été allumées par ces étranges habitants de la grande forêt.