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MICHEL ANTAR

d’être appréhendé par Pandore, gendarme de son état, qu’il serait incivil de confondre avec un personnage féminin de la mythologie grecque.

Une anecdote à ce propos :

Henri Mürger, le doux Mürger en personne, chassait… Quoi ? L’oiseau bleu ou le merle blanc, — on ne sait pas bien au juste, mais il chassait quelque chose, — le fait est notoire.

Il est durement arrêté par un garde, qui veut lui dresser procès-verbal.

« Vous n’avez plus le droit de chasser, le soleil est couché.

— Oui. garde, répond l’auteur de la Vie de Bohème, le soleil est couché, mais il n’est pas encore endormi. »

Et le garde, ayant interrogé l’horizon, opina du bicorne et se replia en bon ordre, songeur.

Or, étant donné que le coucher « officiel » du soleil est motif à interprétations non moins judaïques que désobligeantes pour le philosophe attardé sur les rives propices ou dans les plaines giboyeuses, on se demande où serait le dommage de tolérer soit la chasse, soit la pêche, jusqu’au sommeil de Phébus.

Il y a belle lurette que les braconniers jouissent de cette tolérance, eux et leurs engins, soi-disant prohibés, en toute saison et aux heures indues ; mais on les sait mauvais coucheurs, et ce sont les pacifiques qu’on appréhende à leur place.

« Que faites-vous à pareille heure le long de la rivière ? » demandait-on un jour d’automne à mon ami Domus.

« J’allume les étoiles », répondit-il simplement.

Cette honnête réponse désarma le garde-pêche, qui n’en avait sans doute pas bien compris le sens symbolique, mais qui savait à merveille, l’ayant reconnu, que l’intimé était au mieux avec les autorités du pays, quoique… allumeur d’étoiles.

Émile Maison.

(La suite prochainement.)


DANS LE SUD ORANAIS


AÏN-SEFRA


Aïn-Sefra ! Un nom qui bien souvent nous passe sous les yeux depuis que, à la suite de l’attaque, en 1899, de la mission Flamand par quelques bandes indigènes d’In-Salah, on s’est décidé à occuper les oasis sahariennes, Gourara, Touat et Tidikelt.

Comme beaucoup de villes algériennes, Aïn-Sefra doit sa création à des considérations d’ordre militaire.

Chaque pas en avant, dans l’occupation d’un pays, est marqué en effet par l’établissement, sur les limites extrêmes, de postes destinés à garantir la nouvelle conquête de toute incursion et à permettre au conquérant de s’y installer en sécurité. Ces postes, rarement il faut les créer de toutes pièces. Placés en des points auxquels leur situation donne une importance particulière, ils ont, pour la plupart, servi déjà au précédent possesseur du sol, et il suffit de les fortifier à nouveau, mais de façon moins rudimentaire.

Ainsi nos étapes successives se consolidèrent : dans le Tell, par l’occupation de points tels d’abord que Tlemcen, Mascara, Tiaret, puis plus tard Sebdou et Saïda ; sur les Hauts Plateaux, par celle de Géryville, Aflou et El-Aricha. Malheureusement, dans cette dernière ligne de défense, nous laissions une lacune dangereuse, en négligeant d’occuper la trouée qui faisait communiquer notre Sud-Ouest avec l’oasis de Figuig et les territoires marocains limitrophes, habités par des tribus remuantes et pillardes, les Douï-Menia, les Oulad-Djerir, les Amour, ainsi que la confédération (Zegdou) des Beraber, véritables « Grandes Compagnies » toujours trop disposées à des coups de main armés.

Aussi lorsque, en 1881, Bou-Amema put