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LA FOUX-AUX-ROSES

éclats, heureux de voir l’embarras d’Irène ; néanmoins, il finit par avancer et d’un ton protecteur :

« Laissez-moi faire ; est-ce que des filles savent conduire ? Vous allez voir comme je m’y prends ! »

En même temps, Vol-au-Vent recevait sur l’échine deux coups violents d’un bâton que le jeune garçon venait de ramasser ; la pauvre bête fit entendre un hi-han de détresse et partit au galop.

« Bravo ! » cria Philippe.

« Bravo ! » voulut sans doute répéter Morilo qui s’élança en jappant de plus belle aux côtés de l’âne.

Les cris perçants des petites filles et les exclamations de M. Brial qui sortit de son bureau en courant leur répondirent.

Vol-au-Vent avait tourné brusquement pour éviter le caniche, et Irène, debout dans la charrette, perdant l’équilibre, venait d’être lancée sur la route.

Pendant quelques secondes, la confusion fut grande : aux pleurs et aux cris des deux fillettes, Morilo mêlait ses aboiements et s’empressait autour d’Irène que sa chute avait étourdie. Philippe, brave comme toujours, s’était aplati le long du mur en appelant au secours.

Heureusement, le secours arrivait sous les traits de M. Brial ; il releva la petite fille :

« Êtes-vous blessée, ma chère enfant ? répondez vite. Où souffrez-vous ? demanda-t-il avec intérêt.

— Nulle part, cousin Honoré, je suis au contraire très contente puisque vous m’appelez : « ma chère enfant », répondit la nièce de Mlle  Lissac, rouge de plaisir. Je… oui je le dirai à tante Dor pour lui prouver que vous n’êtes pas notre ennemi comme elle le croit… Mais, je ne puis pas rester sur la route… Comment faire, puisque Vol-au-Vent refuse de marcher !

— Le plus sage est d’entrer avec nous à l’usine et d’attendre que l’humeur de votre âne se soit radoucie ; pour cela, il lui faut un peu de repos, nous allons le laisser au concierge qui en prendra soin. »

Irène, hésitante, regardait tour à tour M. Brial, Nadine et Marthe qui s’était rapprochée. Tout à coup cette dernière s’impatienta :

« Comme tu es longue à te décider, dit-elle, tu n’es donc pas pressée de faire connaissance avec moi ?

— Oh ! je t’assure que si, Marthe, et je vous remercie, cousin Honoré ; mais je me demande ce que dira ma tante en apprenant