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LA FOUX-AUX-ROSES

LA FOUX-AUX-ROSE

(Par A. Mouans)

CHAPITRE VII (Suite.)


Une flottille de bateaux de plaisance, aux voiles blanches ou roses, excita l’admiration de la fillette.

« Ils viennent de Cannes, ces promeneurs, expliqua son cousin ; ils vont aux Îles comme nous ; mais ces barques ont beau être plus élégantes que la Provence, si Raybaud voulait, elles ne pourraient pas nous suivre.

— Certainement, appuya le marin flatté, ma barque marche mieux que ces joujoux ; mais nous ne sommes pas aux régates. Arrêtons-nous pour dire deux mots aux poissons qui frétillent là au fond. »

Norbert ouvrit sa hotte et en sortit avec précaution les lignes montées dont il s’agissait d’amorcer les hameçons.

Habitué aux manières brouillonnes de Marthe, il n’osa d’abord confier qu’une ligne à Irène, qui désirait l’aider ; mais les petits doigts de l’adroite fillette firent merveille. L’île Sainte-Marguerite se dressait à quelque distance ; on mit en panne au milieu des rochers qui l’entourent.

« À l’ouvrage ! dit gaiement Raybaud, et surtout pas de bruit ; si messieurs les poissons nous entendent, adieu la bouillabaisse ! »

Au plaisir de la pêche s’ajouta, pour Norbert, celui d’avoir une aide aussi intelligente que sa cousine. Les yeux fixés sur les flottes, ce fut elle qui, la première, s’aperçut qu’un de ces morceaux de liège remuait. En pêcheur adroit, le jeune garçon attendit quelques secondes, puis ferra d’un coup sec.

Ô triomphe ! quand il eut amené la ligne, il jeta sur le pont une superbe rascasse aux écailles mordorées, à la tête luisante et dure comme un casque.

« Vite à votre poste ! cria Raybaud aux deux enfants, qui ne se lassaient pas d’admirer cette première prise. Ça mord ! ça mord ! »