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Mais de là S. M., mené par le conseil de plusieurs, tira une conclusion qu’il n’attendoit pas, qu’il falloit donq qu’il y allast, et qu’autre que luy n’y pouvoit remédier ; ce qu’il entendit à son très grand regret. Ses raisons estoient à la vérité qu’il estoit sur les depesches concernant la paix et sur son retour à Saumur dont le publiq et le particulier seroient incommodez ; mais la principale que, sy ce voyage ne luy succédoit, il seroit subject à sinistres interprétations, les uns disans que le Roy luy avoit faict autre commandement à part qu’à descouvert, les auctres qu’il avoit apporté quelque mauvaise volonté à l’occasion de la religion ; ce qu’il voulut représenter au Roy pour s’excuser, mais sans effect. Il s’achemina ainsi par les chemins, où il fut aguetté diversement, et enfin arrivant à Quillebœuf, y trouva M. de Belesbat au huictiesme jour d’une fièvre continue, plus procédante de douleur d’esprit que d’humeur du corps, tant pour la résolution qu’il voyoit en Sa Majesté de le tirer de là, que du remors de ce qu’il avoit faict, et de ce que, sortant de là, il avoit à devenir. Cela fut cause qu’il ne luy voulut point bailler les lettres de S. M. plenes d’aigreur, pour n’aigrir sa maladie. Au contraire, pour l’addoucir, après l’avoir exhorté à obéir, l’asseura de sa dignité au service de Sa Majesté et de sa vie, contre ce qu’il eust peu craindre de l’inimitié de M. le Grand, comme de faict il en avoit tiré parole de S. M. et promesse de monsieur le Grand, premier que de se mettre en voiage. Puis traicta avec les colonelz des Lansquenetz, et convint qu’ilz sortiroient quand il voudroit, ausquelz il fit délivrer deux prestz en argent, eu es-