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avait pu détourner de faire une chose qui sans doute ne devait pas être considérée comme déshonorante, puisqu'il se la permettait dans un temps où il devait se laver, lui et les siens, de toute tache. On s'est plaint plus d'une fois, et dès avant cette époque, que la noblesse s'abandonnât à ces divertissements honteux. Ainsi M. Caton qualifie le noble sénateur Cœcilius de danseur et poète fescennin; et il nous apprend, dans le passage suivant, qu'il exécutait des staticules :

Descendit de cantherio, inde staticulos dare, ridcularia fundere

« Il descendit d'un canthérius, et se mit à danser des staticules et des pas grotesques. »

Il dit ailleurs, en parlant du même:

Praeterea cantat, ubi collibuit, interdum Graecos versus agit, iocos dicit, voces demutat, staticulos dat

« Outre cela, il chante dès qu'on l'y invite; il déclame d'autres foisdes vers grecs; il dit des bouffonneries, il joue sur les mots, il exécute des staticules. »

- Telles sont les expressions de Caton, qui, comme vous voyez, ne trouvait pas convenable à un homme grave même de chanter. Cependant d'autres l'ont regardé si peu comme déshonnête, qu'on dit que L. Sylla, homme d'un si grand nom, chantait parfaitement. Cicéron fournit aussi la preuve que l'état de comédien n'était pas déshonorant; car personne n'ignore qu'il fut étroitement lié avec les comédiens Roscius et Ésopus, qu'il employa son éloquence à défendre leurs droits de propriété. On voit encore, dans ses Épîtres, qu'il fut lié avec plusieurs autres comédiens. Qui n'a pas lu le discours dans lequel il reproche au peuple romain d'avoir troublé une représentation de Roscius? On sait positivement qu'il s'exerça souvent avec ce comédien, à qui reproduirait plus de fois la même pensée, l'un par des gestes variés, l'autre par les diverses tournures de phrase que lui fournissait son abondante éloquence; exercice qui donna à Roscius une telle idée de son art, qu'il composa un livre dans lequel il comparait l'éloquence avec la déclamation théâtrale. C'est ce même Roscius qui fut singulièrement chéri de Sylla, et qui reçut l'anneau d'or de ce dictateur. Il jouit de tant de réputation et de faveur, qu'il retirait chaque jour, de ses représentations, mille deniers pour lui, sans compter la part de ses camarades. On sait qu'Ésopus laissa à son fils deux cent mille sesterces qu'il avait gagnés dans la même profession. Mais pourquoi parler des comédiens, puisqu'Appius Claudius, qui obtint les honneurs du triomphe, et qui jusque dans sa vieillesse fut prêtre salien, se fit un titre de gloire d'être celui de tous ses collègues qui dansait le mieux. Avant de quitter l'article de la danse, j'ajouterai qu'on vit dans le même temps trois citoyens très illustres, non seulement s'occuper de la danse, mais même se glorifier de leur habileté dans cet art savoir, Gabinius, personnage consulaire, auquel Cicéron reprocha publiquement son talent; M. Célius, qui se fit connaître dans nos troubles civils, le même que Cicéron défendit; et Licinius Crassus, fils de ce Crassus qui périt chez les Parthes.

CHAPITRE XI. Combien les poissons, et spécialement la lamproie, furent estimés chez les Romains de l'âge qui précéda le nôtre. (CHAPITRE XIV du livre III dans LACUS CURTIUS)

Mais le nom de Licinius m'avertit de passer de la danse des anciens au luxe qu'ils déployaient dans les provisions qu'ils tiraient de la mer; on sait assez que cette famille reçut le surnom de Muréna (lamproie), parce qu'elle affectionna ex- traordinairement les