Page:Macrobe (Œuvres complètes), Varron (De la langue latine) Pomponius Méla (Œuvres complètes), avec la traduction en français, 1863.djvu/18

Cette page n’a pas encore été corrigée

Nous dirons d’abord, d’après Cicéron, quels sont les esprits superficiels qui ont osé censurer les ouvrages d’un philosophe tel que Platon, et quel est celui d’entre eux qui l’a fait par écrit ; puis nous terminerons par la réfutation de celles de leurs objections qui rejaillissent sur l’écrit dont nous nous occupons. Ces objections détruites (et elles le seront sans peine), tout le venin déjà lancé par l’envie, et celui qu’elle pourrait darder encore contre l’opinion émise par Platon, et adoptée par Cicéron dans le songe de Scipion, aura perdu sa force.

La secte entière des épicuriens, toujours constante dans son antipathie pour la vérité, et prenant à tâche de ridiculiser les sujets au-dessus de sa portée, s’est moquée d’un ouvrage qui traite de ce qu’il y a de plus saint et de plus imposant dans la nature ; et Colotès, le discoureur le plus brillant et le plus infatigable de cette secte, a laissé par écrit une critique amère de cet ouvrage. Nous nous dispenserons de réfuter ses mauvaises chicanes, lorsque le songe de Scipion n’y sera pas intéressé ; mais nous repousserons avec le mépris qu’ils méritent les traits qui, dirigés sur Platon, atteindraient Cicéron. Un philosophe, dit Colotès, doit s’interdire toute espèce de fictions, parce qu’il n’en est aucune que puisse admettre l’amant de la vérité. À quoi bon, ajoute-t-il, placer un être de raison dans une de ces situations extraordinaires que la scène seule a le droit de nous offrir, pour nous donner une notion des phénomènes célestes, et de la nature de l’âme ? Ne valait-il pas mieux employer l’insinuation, dont les moyens sont si simples et si sûrs, que de placer le mensonge à l’entrée du temple de la vérité ? Ces objections sur le ressuscité de Platon atteignent le songeur de Cicéron, puisque tous deux sont des personnages mis en position convenable pour rapporter des faits imaginaires ; faisons donc face à l’ennemi qui nous presse, et réduisons au néant ses vaines subtilités : la justification de l’une de ces inventions les replacera toutes deux au rang distingué qu’elles méritent.

Il est des fables que la philosophie rejette, il en est d’autres qu’elle accueille : en les classant dans l’ordre qui leur convient, nous pourrons plus aisément distinguer celles dont elle aime à faire un fréquent usage, de celles qu’elle repousse comme indignes d’entrer dans les nobles sujets dont elle s’occupe.

La fable, qui est un mensonge convenu, comme l’indique son nom, fut inventée, soit pour charmer seulement nos oreilles, soit pour nous porter au bien. La première intention est remplie par les comédies de Ménandre et de ses imitateurs, ainsi que par ces aventures supposées dans lesquelles l’amour joue un grand rôle : Pétrone s’est beaucoup exercé sur ces derniers sujets, qui out aussi quelquefois égayé la plume d’Apulée. Toutes ces espèces de fictions, dont le but est le plaisir des oreilles, sont bannies du sanctuaire de la philosophie, et abandonnées aux nourrices. Quant au second genre, celui qui offre au lecteur un but moral, nous en formerons deux sections : dans la première, nous mettrons les fables dont le sujet n’a pas plus de réalité que son développement, telles sont celles d’Ésope, chez qui le mensonge a tant d’attraits ; et dans la seconde, nous placerons celles dont le sujet