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XXXVIII INTRODUCTION


faire connaître les données sur lesquelles il s’appuie. Celles-ci existent-elles seulement ? Et n’est-ce pas là tout simplement une hypothèse hasardée sans aucun fondement ? D’autres auteurs, Fétis, Mas Latrie, l’ont répété d’après lui, sans fournir la moindre preuve. Il s’agit donc ici d’un fait dont rien ne prouve l’exactitude et qu’on ne peut accueillir que sous toutes réserves. Ce sont encore des suppositions gratuites que celles de Tarbé prétendant que ses ennemis firent bannir le poète de la cour[1], ou que celle de Mas Latrie, prétendant qu’à l’époque où Charles devint roi de France, Machaut « prit le parti de fixer sa résidence loin de Paris et de vivre le plus qu’il pourrait dans ses propriétés de Champagne ou du Gâtinais[2] ». En vérité, rien ne nous autorise à avancer des hypothèses de ce genre, qu’il faut définitivement écarter de la biographie du poète. Machaut, on l’a vu, jouissait de la faveur de Charles, duc de Normandie. Pourquoi n’aurait-il pas continué à en jouir après l’avènement de Charles au trône, même s’il ne nous en parle pas expressément ?

Ce que nous savons des relations de Guillaume avec Jean de Berry, le frère du roi, peut confirmer ce que nous avançons ici. Ce prince ne paraît qu’une seule fois dans l’œuvre de Machaut : avec le poète, il est le personnage principal du Livre de la Fontaine amoureuse. Ce poème ne peut avoir été commencé avant la fin de l’année 1360[3]. Nous y assistons au départ d’un grand seigneur qui se rend comme otage en Angleterre, et ce

  1. Loc. cit., p. XXVIII, à cause des vers : « a mon borgne oucil perçoi Qu’a court de roi chascuns y est pour soi «, dans la Complainte à Henri.
  2. Loc. cit., p. XVI.
  3. Voy. P. Paris, dans le Voir Dit, p. 53, n. 3 et p. 69, n. i.