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INTRODUCTION XXVII


Dit, écrit à sa dame qu’il lui eût porté son livre « ou toutes les choses sont que je fis onques ; mais il est en plus de .XX. pièces ; car je l’ay fait faire pour aucun de mes seigneurs »[1]. Eustache Deschamps nous fait savoir qu’il a remis de la part de l’auteur un exemplaire du Voir Dit à Louis de Maie, comte de Flandre, ajoutant à ce propos cette précieuse remarque que les grands seigneurs chérissent notre poète et prennent « esbatement » en ses « choses », c’est-à-dire en ses poèmes[2]. Amédée VI, comte de Savoie, fait remettre à Machaut une somme de 300 écus pour un poème (nous ne savons lequel) que celui-ci lui a dédié[3]. C’est donc à ses talents de musicien et de poète que Guillaume doit ses relations avec les plus hauts personnages de son époque. De temps en temps, sans doute, il quitte sa paisible retraite de Reims pour se rendre auprès de l’un ou de l’autre de ces seigneurs qui l’admettent dans leur intimité et font appel à ses bons services. Il nous dit encore dans son Voir Dit', que son départ de certaine ville qu’il ne nomme pas (ce n’est pas Reims, dans ce cas particulier) est motivé par le « commandement d’un seigneur qu’en France n’a point de greigneur fors un[4] ». Il ne peut s’agir que de Charles V, alors duc de Normandie, qui le mande auprès de lui et qui lui fit « grant honneur et grant feste[5] ». Et ajoute le poète, « moult de biaus dons me donna et le sien moult

  1. Livre du Voir Dit (éd. P. Paris), p. 69.
  2. Œuvres complètes d’ Eustache Deschamps, 1, 87-88 (voy. plus haut, p. iv).
  3. Oton de Granson und seine Dichtungen, von L. Schirer (1905), p. XIV,
  4. Livre du Voir Dit, p. 71.
  5. Ibid., p. 131.